MAURICE AUDIN : le CRIME D’ÉTAT enfin RECONNU !
Le 13 Septembre, 2018
Par Maud Vergnol
Emmanuel Macron se rend aujourd’hui chez Josette Audin et publie une déclaration pour reconnaître le crime d’État commis sur son mari. En 1957, en pleine bataille d’Alger, l’armée française avait torturé et assassiné ce jeune mathématicien communiste anticolonialiste. Justice lui est enfin rendue. Après un demi-siècle de déni, avec ce geste historique, la France regarde en face l’une des pages les plus sombres de la colonisation.
61 ans, 3 mois et 2 jours… C’est le temps qu’il aura fallu à l’État français pour reconnaître que Maurice Audin a bien été torturé et assassiné par l’armée. La déclaration d’Emmanuel Macron et sa visite, cet après-midi, à Josette Audin, représentent une formidable victoire. Un bonheur inestimable pour sa famille, d’abord. Car Josette Audin, qui a aujourd’hui 87 ans, s’est battue sans relâche pendant plus de soixante ans pour que la vérité soit faite sur l’assassinat de son mari. Elle l’a fait pour lui, mais aussi pour tous les Algériens, victimes de cette sale guerre que les autorités françaises refusaient jusqu’à présent de regarder en face.
Ce geste historique du Président de la République marque la fin d’un demi-siècle de déni. Il va permettre à la société française d’affronter plus sereinement les pages les plus sombres de son histoire coloniale. Car le sort d’un homme révéla tout un système : celui de la pratique généralisée de la torture pendant la guerre d’Algérie. C’est aussi une précieuse victoire pour tous les progressistes qui n’ont jamais abandonné Maurice Audin, devenu un symbole de l’anticolonialisme et de la lutte contre la torture. Et le combat fut long ! Des lois d’amnistie à l’omerta de la Grande Muette, tout a été fait pour que l’« affaire » tombe dans l’oubli. Mais plusieurs générations d’historien(ne)s, de militant(e)s communistes, de mathématicien(ne)s et de journalistes ont continué à se passer le témoin, jusqu’à cet heureux dénouement.
L’Humanité n’a jamais renoncé, depuis l’arrestation de Maurice Audin en juin 1957, jusqu’à l’appel publié le 29 mai dernier dans nos colonnes, auquel s’était associé Cédric Villani, à faire vivre ce combat pour la vérité et la justice (lire « Un long combat d’Humanité »). Sa rédaction n’a jamais oublié le visage de Maurice Audin, éternel jeune homme de 25 ans, le regard tourné vers l’avenir. Un grand journaliste, Henri Alleg, disparu en 2013, qui fut lui aussi victime de la torture, n’a cessé d’y veiller : « N’oubliez jamais Maurice. »
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LA SUITE EN LIEN CI-DESSOUS :
Maurice AUDIN : Pourquoi Emmanuel Macron rompt le silence
Par Jean LÉVY sur son blog
Le 13 septembre 2018 une déclaration du Président de la République reconnaît la responsabilité de l'armée française dans ce crime, couvert depuis plus de soixante ans, par tous les gouvernements successifs
Qui n'exprimerait pas sa satisfaction d'une telle prise de position des autorités françaises ?
Déclaration présidentielle :
Le président de la République a (…) décidé qu’il était temps que la Nation accomplisse un travail de vérité sur ce sujet. Il reconnaît, au nom de la République française, que Maurice Audin a été torturé puis exécuté ou torturé à mort par des militaires qui l’avaient arrêté à son domicile.
« Si la mort de Maurice Audin est, en dernier ressort, le fait de quelques-uns, elle a néanmoins été rendue possible par un système légalement institué : le système « arrestation-détention », mis en place à la faveur des pouvoirs spéciaux qui avaient été confiés par voie légale aux forces armées à cette période »
Enfin un bonne nouvelle pour la famille de Maurice Audin, ses amis et camarades, qui depuis tant et tant d'années se sont dépensés pour réclamer et obtenir justice.
Qu'ils se soient réclamés de gauche ou de droite, les différents gouvernements qui se sont succédés depuis la IVème République et tout au long de la Vème ont caché la vérité sur les exactions permanentes dont se sont rendus coupables les militaires français, à l’instigation de certains de leurs chefs durant cette guerre coloniale. Il fallait alors, disait-on, préserver l'unité de l'armée, qui faisait, aux yeux des hommes politiques au pouvoir, du PS à la droite, "faisait du bon boulot" au service des intérêts privés français en Algérie. Des officiers tortionnaires, les colonels ou généraux paras, qui s'étaient fait la main en Indochine, ne représentaient pas l'ensemble de la hiérarchie militaire. Des officiers de haut rang comme le général Jacques de la Bollardière, compagnon de la Libération, ont sauvé l'honneur français en dénonçant publiquement la torture pratiquée dans les opérations.
C'est dans ce contexte que Maurice Audin, combattant cette guerre infâme, a été assassiné par des officiers para, faisant disparaître le corps pour brouiller les pistes, avec la complicité ouverte ou lâche des politiciens qui ont couvert de leur autorité la sale guerre d'Algérie. C'est ainsi que François Mitterrand, président de la République, a refusé de réouvrir le dossier Audin, préférant rendre leur honneur perdu aux généraux putschistes de l'OAS Salan, Challe, Jouhaud et Cie.
Il a fallu donc plus de soixante ans pour que justice soit rendue.
Faudrait-il encore que cette décision présidentielle soit indemne de considérations politiciennes.
Emmanuel Macron n'affiche pas de prédilection pour notre histoire nationale. Il se projette délibérément dans un devenir européen. Rappelons-nous ses propos sur la colonisation, jugée par lui crime contre l'humanité. Non par anticolonialisme, ses propos méprisants sur les Calédoniens le démontrent, mais par son rêve mondialiste : Emmanuel Macron est "internationaliste" dans le sens où le fondateur de la Banque Rothschild au XVIIIème siècle a esséminé ses succursales au-delà des frontières dans les diverses métropoles d'Europe de ce temps...
En outre, Emmanuel Macron est appelé par nombre de ses partisans à « gauchir » sa politique...L'opération Audin en offre l'occasion.
Ne soyons donc pas dupes des motivations politiques du Président, même si nous saluons sa décision de pure justice.
J.L.
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L'Humanité-Dimanche du 8 décembre 1957:

Lien ci-dessous pour lire le texte :
source : http://audin.lautre.net/
Torture en Algérie : Henri Alleg raconte