Le Che et l’économie mondiale [Par Rémy Herrera]
Par Rémy HERRERA, Chercheur au CNRS, Centre d’Économie de la Sorbonne
Les recherches portant sur la pensée d’Ernesto Che Guevara sur l’économie sont nombreuses, mais rares sont celles qui abordent sa dimension regardant l’économie mondiale [1]. En effet, cet aspect est fréquemment négligé, relégué au second plan par rapport aux positions qu’il a exprimées à propos de la politique internationale, et donc aussi mal compris – voire manipulé, tantôt pour l’opposer artificiellement à Fidel Castro, tantôt pour le tourner contre l’URSS.
Le Che n’était pas économiste (de formation académique) ; c’est peut-être ce qui lui a permis de penser en empruntant des voies hétérodoxes, de remettre en question des vérités établies en économie, de s’aventurer dans des réflexions originales et courageuses à l’époque. La réalité de ses responsabilités au sein de la direction de la révolution cubaine (commandant militaire, dirigeant de la Banque centrale, ministre de l’Industrie…) l’a obligé à articuler, sur cette dimension internationale, la dimension nationale des questions étudiées. Sa pensée sur la politique internationale ne peut être séparée de celle sur l’économie mondiale.
Commençons par un point crucial : le Che s’appuie, dans ses raisonnements, sur l’appareil théorico-pratique du marxisme-léninisme. Il était, que cela plaise ou non, communiste. Mais, il a manifesté, très tôt, une certaine inquiétude face à l’insuffisance du socialisme réellement existant à développer ses propres mécanismes économiques pour renforcer sa position dans la compétition que lui imposait le système capitaliste, dominant à l’échelle mondiale. Il avait dit un jour : « j’appartiens par ma formation idéologique au camp de ceux qui pensent que la solution aux problèmes du monde se trouve derrière le rideau de fer ». Mais il n’hésita pas à critiquer l’usage non critique de relations marchandes et monétaires dans le cadre des réformes mises en œuvre en URSS dans la décennie 1960 – comme l’a d’ailleurs aussi fait Fidel, par exemple, dans son discours pour le 6e anniversaire de la révolution cubaine (1965).
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