L’HÔPITAL PUBLIC reste dans la LOGIQUE FOLLE de la gestion commerciale [un entretien avec le professeur André Grimaldi]
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France : « L’hôpital public reste dans la logique folle de la gestion commerciale »
Article publié initialement le 20 décembre 2020
Entretien avec André Grimaldi conduit par Éric Favereau
Sur l’état de santé des hôpitaux publics, le professeur André Grimaldi, ancien chef de service de diabétologie à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, est devenu un baromètre. Depuis plus de dix ans, il anime des débats et mène combat pour sortir l’hôpital public du modèle entrepreneurial et de la logique de communication vers lesquels il est conduit. Bien que très respecté, certains lui reprochent une vue trop hospitalo-centrée de la santé, d’autres de rester cantonné à des schémas passés, évoquant en réponse « l’hôpital de demain ». Il rétorque : « La santé, ce n’est pas une affaire de management. » En cette fin 2020, rarement il s’est montré aussi inquiet.
Après deux vagues épidémiques et un Ségur [« consultation des acteurs de la santé » entre mai et juillet 2020], comment va l’hôpital public ?
L’hôpital va moins bien qu’il n’allait avant la première vague, et à l’époque, il allait déjà très mal. Ce n’est pas un message d’optimisme. Certes, le Ségur a permis d’augmenter les salaires – non pas suffisamment mais significativement. Sur le fond, le Ségur n’a néanmoins rien changé à ce qu’était la maladie chronique de l’hôpital public. Nous restons dans la même logique folle de contrainte budgétaire et de gestion commerciale.
C’est-à-dire ?
Dans les années 2000, dans tous les pays développés, s’est imposée l’idée de « l’hôpital entreprise ». Toute activité humaine rémunérée devait être mesurée, quantifiée puis tarifée pour être soumise au jeu de la concurrence censée permettre l’obtention de la qualité au plus bas coût. La santé devait l’être aussi. Une vision de gestion commerciale de l’hôpital s’est imposée, avec la généralisation de Tarification à l’activité (T2A), dont l’objectif initial, faut-il le rappeler, était la mise en concurrence avec les cliniques privées. Avec la crise de 2008, est venue s’ajouter une contrainte budgétaire cumulative année après année. La T2A est devenue un outil pour réguler le coût de la santé. Pour maintenir l’équilibre financier, il faut en faire toujours plus, sans augmenter les dépenses, notamment de personnel.
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