IL Y A UNE STRATÉGIE DE MISE EN DÉFICIT DU SYSTÈME DE RETRAITES
UN ENTRETIEN AVEC MICHAËL ZEMMOUR, maître de conférences en économie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et le coauteur du système français de protection sociale (La découverte, 2021)
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Alors que le projet de réforme des retraites de 2019 consacrait un changement total d’architecture du système, Emmanuel Macron vient récemment d’abandonner cette stratégie systémique. Le décalage de l’âge de départ à la retraite à 64 ans – proposé par le candidat E. Zemmour – ou même à 65 ans – piste privilégiée par V. Pecresse et E. Macron – a désormais le vent en poupe. Michael Zemmour est maître de conférences en économie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et le coauteur du système français de protection sociale (La découverte, 2021). Ce dernier nous invite à reconsidérer certaines idées reçues sur le système de retraite français – insoutenabilité, hausse des dépenses… – tout en nous proposant quelques pistes de réflexion pour en améliorer l’architecture. Entretien réalisé par Jules Brion et retranscrit par Dany Meyniel.
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LVSL : Dans vos travaux, vous montrez que la réforme des retraites voulue par Emmanuel Macron en 2019 entérinait le passage d’un régime à prestations définies à un système à cotisations définies. Ce nouveau paradigme fonctionnerait « en pilotage automatique » puisqu’aucun déficit ne serait possible en théorie. L’annonce récente du candidat Macron revient totalement sur cette volonté de changer l’architecture du système. Devons-nous pour autant nous réjouir de ce discours ?
Michaël Zemmour : L’intérêt du système en pilotage automatique est qu’il permet à la politique de se désengager des réformes. On met le système dans une trajectoire voulue et les ajustements se font automatiquement, sans débat politique. L’annonce qui vient récemment d’être faite met de côté cette volonté de changer l’architecture du système pour revenir à des discours plus habituels en France : on va faire des économies sur les retraites en décalent l’âge de pension. On assume frontalement la conflictualité. Est-ce que nous devons nous en réjouir ? Bien sûr que non, la réforme qui est proposée est plus dure dans ses paramètres que tout ce qui avait été proposé en 2019. Derrière la réforme Delevoye, il y avait une volonté de faire des économies mais celles qui sont proposées avec la retraite à 65 ans sont plus importantes. De tous les scénarios de 2019, aucun n’envisageait de décaler l’âge de la retraite à 65 ans en seulement neuf ans, comme cela a été récemment annoncé.
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