Commission parlementaire sur le nucléaire : l’ancien PDG d’EDF, Henri Proglio, accuse Bruxelles et les gouvernements français d’avoir saccagé le système électrique français -Par Jean LÉVY
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Henri Proglio a dirigé EDF de 2009 à 2014, à cet instant critique où la politique d'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité, décidée par Bruxelles à la fin des années 1990, est pleinement entrée en application.1
Lorsqu’il prend la tête de l’entreprise publique « au début du XXIe siècle », raconte-t-il, « EDF est exportateur d’énergie, a les prix les moins chers d’Europe (deux fois et demie moins chers que l’Allemagne) et un contrat de service public qui fait référence dans le monde, et donne à la France un atout formidable en matière d’émissions de gaz à effet de serre. Il n’y avait plus qu’à tout détruire : c’est chose faite ! »
Car, affirme Henri Proglio,"l'obsession allemande » : c'est de détruire EDF
Face aux députés, le ton est calme, accablé par le constat, mais les mots sont grinçants, et pendant près de deux heures, les balles sifflent. Contre l'Europe, d'abord, accusée d'avoir délibérément ruiné, sous la pression de l'Allemagne, le potentiel français. L'Allemagne a choisi l'industrie comme axe majeur de son économie, puis tenté l'energiewende [la transition énergétique allemande, axée sur la sortie du nucléaire et le développement des renouvelables, NDLR]. Cela par s'est terminé par un désastre absolu, les énergéticiens allemands étaient ruinés, totalement vulnérables", détaille l'ancien patron d'EDF. "comment voulez-vous que ce pays accepte que la France dispose d'un outil compétitif aussi puissant qu'EDF à sa porte ? L'obsession allemande depuis trente ans, c'est la désintégration d'EDF. Ils ont réussi".
Écarté de son poste par François Hollande au profit de Jean-Bernard Levy, alors jugé plus en phase avec les projets de décroissance nucléaire du gouvernement, Henri Proglio a ainsi lâché la bride devant les députés ce 13 décembre, accusant ouvertement Bruxelles et « les gouvernements successifs » d'avoir délibérément saccagé, depuis 2010, le système électrique français.
A propos du prix du mégawatt-heure : "Cela a été fixé par voie autoritaire", révèle Henri Proglio. "On a fait la fortune des traders (...) Pourquoi avoir abattu le service public de l'électricité ?", interroge l'ancien PDG d'EDF.
Ainsi un grand patron a expliqué aux députés les raisons profondes de la crise de l'électricité, alors que Macron et son clan annoncent des délestages systématiques cet hiver, si celui-ci est rigoureux...
La nature, ces jours-ci, a répondu.
Quand on vous répète depuis trente ans que tout le mal, dont souffre notre économie, prend sa source dans l'aventure européenne, le Traité de Maastricht et celui de Lisbonne, mis sur les rails par les barons de l'industrie allemande.
JEAN LÉVY