Vivre au TRAVAIL plutôt qu’à la retraite [sur le blog de Descartes]
« Aucun pays, aucun peuple ne peut envisager l’âge du loisir et de l’abondance sans effroi. » (John Maynard Keynes)
Samedi, j’étais à la manif. Pour protester contre une réforme des retraites qui à mon sens est inique et injuste, bien sûr. Pour retrouver des amis et tâter un peu le pouls de la foule aussi. Mais une manifestation, c’est aussi un puissant aliment à la réflexion. Dans les pancartes, dans les discussions, dans les tracts et les slogans, on voit se dessiner une forme de pensée sociale, une idéologie.
Et le moins que je puisse dire, c’est que je ne suis pas emballé. Dans un papier précédent, je m’insurgeais contre cette idée qui veut faire du monde du travail une sorte de purgatoire par lequel on devrait passer pour, soixante ans sonnés, entrer au paradis du loisir. Et bien, cette idée semblait aux manifestants tellement évidente, qu’elle ne supporte pas de discussion. Témoin, la multiplication des pancartes du genre « je ne veux pas perdre ma vie à la gagner » ou « Macron veut me voler deux années de vie ». Comme si les années au travail ne comptaient pas dans la « vie », comme si l’on ne commençait à « vivre » qu’une fois la porte du travail franchie.
Bien entendu, la faute n’incombe pas aux manifestants. Ils ne font que refléter l’idéologie dominante, qui depuis plus de quarante ans dévalorise le travail et promeut le loisir à tout prix. Le plus amusant, cependant, est que cette idéologie n’a pas totalement remplacé la logique antérieure qui valorisait au contraire le travail : on n’assume pas totalement l’idée d’une équivalence entre loisir et retraite. Au contraire, on voit se multiplier les argumentations sur « l’utilité » des retraités : de la garde des petits enfants au travail de son potager, du bricolage aux activités associatives, tout y passe. Le discours d’un Ruffin faisant de la retraite l’occasion de pêcher à la ligne ou de prendre des cours de zumba, ou ceux d’une Rousseau vantant à la tribune de l’Assemblée « le droit à la paresse » ne semblent pas avoir beaucoup de prise sur une manifestation essentiellement syndicale. L’image proposée samedi est plutôt celle du retraité « actif » qui continue à sa façon à « travailler ».
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Vivre au travail plutôt qu'à la retraite
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