Cérémonie des JO : sur la Seine, les athlètes algériens jettent des roses en hommage aux victimes du massacre d'octobre 1961
Lors de la cérémonie d'ouverture des JO de Paris, qui se déroulait sur la Seine le 26 juillet, la délégation algérienne a jeté des roses dans le fleuve, en hommage aux victimes du massacre du 17 octobre 1961. Cette nuit-là, des dizaines d'Algériens furent jetés dans la Seine par les policiers français.
Un geste politique fort. En jetant des roses dans la Seine lors de la parade nautique qui s’est déroulée le 26 juillet sur le fleuve parisien en ouverture des Jeux olympiques (JO), les membres de la délégation olympique algérienne ont rendu hommage aux manifestants tués dans la capitale française le 17 octobre 1961.
Cette nuit-là, une manifestation pacifique de milliers d'Algériens, à l'appel de la fédération française du FLN (Front de libération nationale), avait été réprimée dans le sang par les forces de l'ordre françaises. Le nombre de morts, ce jour-là et ceux qui suivirent, est estimé par les historiens entre 30 et 200, dont certains jetés dans la Seine.
«Tahia Djazair» - «Vive l’Algérie» - ont scandé les membres de la délégation olympique algérienne qui se trouvaient sur le bateau, avant de lancer des roses dans la Seine, à côté d'un pont d'où furent jetés des Algériens par la police française.
Une page sombre de l'Histoire de France
C’est l’une des pages les plus sombres de l’Histoire de France. Le 17 octobre 1961, des Algériens avaient afflués en train, en métro ou à pied, vers le cœur de Paris pour manifester contre le couvre-feu qui leur était imposé. En face, ils ont trouvé environ 1 600 policiers de la capitale, lourdement armés, répondant aux ordres de leur préfet Maurice Papon.
Étouffé dans un premier temps par les politiques, censuré dans les médias, puis occulté, ce drame demeure sujet à controverses. Plus de 60 ans après, le bilan reste toujours incertain.
Il a fallu attendre 38 ans avant que les faits soient reconnus devant une cour. Le drame fut qualifié de «massacre» par le parquet de Paris le 12 février 1999. Il faudra attendre 25 ans de plus pour que le drame soit reconnu officiellement par la France ; le 28 mars 2024, l'Assemblée nationale française, approuvant une proposition condamnant le «massacre» d'octobre 1961.
Un «crime d’État», dénoncent les familles des victimes
Familles de victimes, témoins du drame, associations ou encore historiens ont réclamé, pendant des dizaines d’années, la reconnaissance d’un «crime d’État». Le président François Hollande, qui avait évoqué en 2012 une «sanglante répression», et son successeur Emmanuel Macron qui avait déclaré en 2021 des «crimes inexcusables pour la République», ont été vivement critiqués dans ce sens pour ne pas avoir qualifié ce massacre de «crime d'État». Le président algérien Abdelmadjid Tebboune fustigeant, de son côté, le colonialisme «chronique» de la France.
La question de la colonisation française (1830-1962) pèse encore très lourd entre les deux pays. Cette jetée de fleurs, symbolique, sur la Seine intervient d’ailleurs au moment où les relations entre Paris et Alger sont au plus bas dans un contexte de fortes tensions dans de multiples dossiers, dont notamment la problématique mémorielle, qui reste, entre autres sujets épineux, au cœur des tensions entre les deux capitales.
Ni la visite du ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin à Alger en novembre 2023, ni celle du président Emmanuel Macron en août 2022, n’avaient réussi à faire avancer le dossier. Côté algérien, la «visite manquée» du président Abdelmadjid Tebboune en France, à chaque fois renvoyée aux calendes grecques, continue de ponctuer le rythme de cette relation tumultueuse, sur fond de chauds et froids récurrents entre les deux pays.
PT