TRAVAIL ET SOCIALISME – Par Gilles Questiaux
Il y a travail, travail, et travail ...
La dictature du prolétariat est la dictature de la classe ouvrière, et c’est un des définissants du socialisme. Mais qu’en reste-t-il dans les conditions actuelles où les ouvriers sont peu visibles, dispersés dans les services, et quand l’expansion du capital fixe a considérablement modifié l’expérience concrète du travail ? l’argumentaire de base pour refuser la perspective du passage au socialisme est de nier qu’il existe encore des classes, ni des ouvriers dans les conditions techniques moderne de production, et d’en inférer que la dictature du prolétariat est une utopie anachronique (bien que ce ne fut pas une utopie, mais une stratégie).
La condition ouvrière est associée dans les représentations courantes au travail physique pénible et au contact de la matière, ou exposé aux intempéries : dans la Bible le peuple est constitué l’ensemble de ceux qui de toute éternité sont voué à « puiser l’eau et fendre le bois » (cité je crois par Marcus Rediker). Le travailleur est celui qui est entièrement aliéné à ce genre de tâches indispensables, répétitives, pénibles, et méprisées.
Le seau et la hache ont été relayés par d’autres outils plus complexes à manier – et encore ! - mais il reste que l’exécutant contemporain de la transformation productive de la nature se retrouve finalement dans des conditions quotidiennes qui ne sont pas aussi éloignées qu’il semble du prolétaire biblique : précarité, exploitation, épuisement, démoralisation etc.
Mais il existe déjà deux concepts différents du travail : le travail comme temps, le temps passé à utiliser sa force, dont la valeur est mesurée par le temps de travail nécessaire pour produire les marchandises nécessaires pour la renouveler, dans les conditions déterminées par l’état des techniques, et le travail comme force appliquée, comme dépense d’énergie physique. Lorsqu’ils durent trop longtemps le premier ennuie, et le second fatigue, comme nous savons tous.
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