À L’HÔPITAL, une lutte des classes sous anesthésie
Une grève nationale a débuté le lundi 4 novembre 2024 dans des hôpitaux pour dénoncer le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2025. En fonction de leur position sociale au sein de la hiérarchie hospitalière, le personnel ne vit pas de la même manière les restrictions budgétaires gouvernementales et la transformation de l’hôpital en une entreprise comme une autre. Le « prolétariat de l’hôpital public » (les paramédicaux et le personnel des secteurs logistiques et administratifs) souffre davantage que les médecins ou les chefs de service et déplore que leurs revendications politiques plus radicales ne soient jamais entendues.
J’ai baigné toute mon enfance et mon adolescence dans un environnement hospitalier: mon père, mes oncles et ma grand-mère ont travaillé pendant une quarantaine d’années comme brancardier et aides-soignant(e)s. Ils s’identifiaient aux personnages de la série comique H (1998), qui met en scène des paramédicaux issus de l’immigration post-coloniale (Jamel Debbouze, Eric Judor et Ramzy Bedia). À contrario, les feuilletons Urgences (1994), Grey’s Anatomy (2005) et Hippocrate (2018), qui font la part belle aux « héroïques » médecins et chirurgiens, n’ont jamais été des références culturelles. Lors de repas dominicaux chez ma grand-mère, j’ai assisté à de nombreuses tirades contre la direction, accusée d’appliquer bêtement les réformes gouvernementales austéritaires, mais également contre les « bourgeois de l’hôpital »: les praticiens-hospitaliers (PH: médecin, chirurgien, pharmacien ou chirurgien-dentiste), les professeurs des universités praticiens-hospitaliers (PUPH) et les chefs de service. Ainsi, quand ils entendent parler de « soignants » de la part d’Emmanuel Macron, des médias ou au cinéma, comme s’il s’agissait d’une entité uniforme aux intérêts de classe identiques, ils sont quelque peu agacés, car les rapports sociaux antagonistes et conflictuels sont légions dans les services hospitaliers.
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