Grève des cheminots: qui nous prend en otage ?
« Pas un jour sans qu'il y ait des retards
ou des suppressions de trains ! »
Vrai ! 98% des retards et des suppressions de trains correspondent à des problèmes techniques induits par les économies effectuées sur l'entretien et la surveillance des trains et du réseau ferré (2% seulement sont dus aux grèves !). De plus, quand il y a panne ou retard, les informations passent mal depuis l'automatisation de l'accueil et des guichets. Le désengagement de l'Etat par décentralisation aux régions, avant-goût de la privatisation pur et simple de la SNCF, annonce un désastre digne de celui qui fait, depuis sa privatisation, la réputation du chemin de fer britannique.
Dans ce contexte, les cheminots sont très souvent les premières cibles de la colère légitime des usagers, pendant que les vrais responsables (l'Etat et la direction de la SNCF), saboteurs de ce service public fondamental, organisent la propagande médiatique anti-cheminot, et s'enrichissent à nos dépends des non- remboursements de plus en plus fréquents des billets pour cause de retard…
« Les cheminots sont des privilégiés ! »
Faux ! Le régime spécial a été créé en 1909 pour tenir compte des contraintes du métier de cheminot : spécificité des tâches, obligations de sécurité, continuité du service public. Nous ne sommes plus au temps de la vapeur, mais ces contraintes existent toujours. 120 000 cheminots ont des horaires atypiques ou décalés (de nuit, les weekends end et jours fériés), des conditions de travail qui n'ont rien à voir avec les « privilèges ». En échange de la possibilité de partir à 55 ou 50 ans, les cheminots touchent de plus petites retraites que les autres salariés à qualification égale. 62 % des pensionnés de la SNCF touchent moins de 1500 euros brut par mois. Or on leur demande maintenant de travailler plus longtemps et de toucher moins encore : L'introduction de la décote va se traduire par une baisse des retraites de près de 30 %. Chacun peut donc comprendre la légitimité de leur colère et de leur volonté de défense. Il faut défendre l'égalité et l'équité entre régimes de retraites, mais par le haut, pas par le bas. Les salariés qui ont des métiers difficiles, pénibles ou dangereux doivent pouvoir partir à 55 ans.
En 1995, on a parlé de grève par procuration. Aujourd'hui le gouvernement prévoit une nouvelle attaque du système de retraite pour tous les salariés, public et privé, après les municipales de 2008 : entre autres, tous les salariés passeront à 41 puis 42 ans de cotisations. Il y a aujourd'hui une communauté d'intérêts entre ceux qui défendent les régimes spéciaux et ceux qui refusent une nouvelle remise en cause du régime général… Nous sommes tous concernés, et c'est maintenant qu'il faut être solidaires !
L'ex-numéro 2 du MEDEF l'annonce clairement ( Challenges, 4 octobre 2007) : « Le modèle social français est le pur produit du Conseil National de la Résistance, un compromis entre gaullistes et communistes. Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s'y emploie ». Quand tous les acquis sociaux auront été alignés par le bas, le gouvernement et le MEDEF n'auront plus qu'à qualifier de « privilèges » nos retraites et nos congés payés !