CGT : Grenouillage au sommet...pour éviter un débat sur l'orientation ?
Thierry Lepaon s’entoure de proches pour choisir la prochaine direction de la CGT
DOCUMENT - Le secrétaire général de la CGT a remis son mandat mais compte bien choisir son successeur. Le métallurgiste Philippe Martinez va l’aider à constituer la nouvelle direction. Un signe.
Ce jeudi [8 janvier 2015] , à Montreuil, dans le patio du complexe immobilier de la CGT, Thierry Lepaon a pris la parole devant l’ensemble des militants et salariés réunis pour une minute de silence. Et dimanche[ 11 janvier 2015], il a bien l’intention de représenter la centrale lors de la marche républicaine après l’attaque de Charlie Hebdo.
L’ancien syndicaliste de Moulinex est comme ça. Même contraint à céder la place à la suite des affaires financières dans lesquelles il est impliqué, il s’accroche. Discrédité, il a dû se résoudre à rendre son tablier après le coup de grâce porté par l’ ancien numéro Un de la CGT Louis Viannet qui lui a demandé de démissionner . Mais il n’a pas l’intention de s’effacer. Non seulement, il ne quittera pas la Commission exécutive, direction élargie de la centrale, composée de 54 membres actuellement. Mais alors que cette instance doit proposer mardi 13 janvier une nouvelle équipe au parlement de la CGT - le Comité confédéral national -, il a réussi à obtenir qu’elle lui délègue cette tâche ainsi que le choix des cégétistes qui vont l’y aider. Et largement : 34 voix pour, 12 abstentions et 4 votes contre.
L’échéance est proche mais il a fallu aux responsables cégétistes attendre le début de la soirée de ce mercredi pour connaître la composition du « groupe de travail » dans un courrier signé Thierry Lepaon adressé par mail vers 19 heures. Elle est composée de quatre membres de la commission exécutive. Le premier, Pascal Fournet, appartenant également de son cabinet, est son homme de confiance, qui jusqu’au bout l’a soutenu dans sa volonté de se maintenir à la tête de la centrale malgré les scandales. Cet ancien membre de la fédération de l’agroalimentaire, est très actif sur son compte Facebook, où il s’affiche en portrait avec des personnalités dès qu’il le peut, à commencer par Bernard Lavilliers, et n’hésite pas à tacler Eric Aubin, que son « patron » considère comme son ennemi juré. Il est si actif qu’hier, dès 21 h, il postait sur son compte des clichés de Thierry Lepaon et lui avec Charb. « Lors des CCN , il se met toujours au fond en haut à droite de la salle, pour voir qui fait quoi et qui parle avec qui », commente un Cégétiste qui, comme de nombre d’autres, s’en méfie. Colette Duynslaeger est la seule femme du lot. La secrétaire générale de la fédération des postes et télécoms CGT, qui est en train de passer la main, quitte ses responsabilités sur un piètre bilan : celui d’une baisse continue de ses effectifs adhérents et de ses scores électoraux sous sa direction. Mais elle est un soutien indéfectible de Thierry Lepaon. Mardi, elle n’a pas hésité à critiquer Louis Viannet pour n’avoir « pas su rester à [sa] place ».
Comme d’ailleurs Frédéric Imbrecht et sa compagne Virginie Gensel-Imbrecht qui ont affirmé n’avoir « aucune leçon à recevoir d’anciens dirigeants ». Philippe Texier est, lui, « coordinateur de la direction confédérale ». L’encore numéro Un de la CGT a choisi de déléguer à ces deux cégétistes le pouvoir d’administrer la confédération après la démission du trésorier, Eric Lafont. Cela en fait des successeurs potentiels qui ne devraient pas s’attaquer au grand ménage malgré les révélations toutes confirmées sur la gabegie financière qui a accompagné l’arrivée de Thierry Lepaon à la tête de la CGT (près de 150.000 euros de travaux et achat de mobiliers dans son appartement de fonction, 62.000 euros pour la rénovation de son bureau, 26.650 euros de prime de vrai/faux départ). Le quatrième membre du groupe de travail est le secrétaire général de la Métallurgie CGT, Philippe Martinez, qui, contrairement aux trois autres, a fini par demander la démission du secrétaire général... Et ne cache pas son projet de devenir numéro Un de la centrale. Est-ce pour préparer ensemble la nouvelle équipe qu’il serait amené à diriger que Thierry Lepaon l’a désigné ? C’est le scénario le plus probable. L’un des proches du métallurgiste, François Thiery-Cherrier, avait d’ailleurs souligné mardi devant la commission exécutive la nécessité que le successeur éventuel de l’actuel secrétaire général de la CGT devrait participer aux réflexions sur le futur bureau confédéral.
Si l’option de désigner un pape de transition, auquel Philippe Martinez succèderait au prochain congrès, en 2016, l’emportait cependant, le nom de Frédéric Imbrecht revient avec insistance. Parmi les autres rumeurs tenaces, il y a le retour de Nadine Prigent au bureau confédéral. Celle que Bernard Thibault avait choisi pour lui succéder sans succès n’attend que ça. Mercredi, devant la commission exécutive, pour tenter d’apaiser le débat, Eric Aubin, membre du bureau confédéral sortant et autre candidat malheureux à la succession du leader cheminot, a proposé que ni elle, ni lui, ni Agnès Naton, qui avait aussi postulé, ne fassent partie du prochain bureau confédéral. « Celui qui voudra m’écarter de la CGT n’est pas né. Je suis bien sûr à la disposition de l’organisation », aurait répondu sèchement celle que Thierry Lepaon a mis au poste de clé de gestion des cadres de l’organisation à son arrivée à la tête de la confédération, début 2013. D’autres comme Pascal Debay se verraient bien aussi au bureau confédéral. Reste à savoir si le Comité confédéral national acceptera de se voir ainsi confisquer la constitution de la nouvelle équipe dirigeante par un leader désormais discrédité mais particulièrement habile dans des manoeuvres d’appareil bien peu démocratiques.
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