Cuisine (électorale): « au bon leurre »
Lotus Bleu contre Cerisier Rose. La première dominait le marché. La seconde n’avait d’autre ambition que de prendre la première place.
Tous les arguments étaient bons pour dénigrer la cuisine de l’autre : « les hamburgers du Lotus Bleu étaient, disaient leur concurrent, « nappés d’une sauce, dite hollandaise, trop lourde, difficilement digeste ». « Les frites du Cerisier Rose baignaient dans une huile frelatée », répondait le restaurant d’en face.
La contre-publicité de l’une par rapport à l’autre faisait rage, entraînant une fuite des consommateurs, qui, de plus en plus nombreux, s’abstenaient de fréquenter ces deux établissements.
Mais où prendre rapidement, et pour pas cher, son repas de midi ?
Certes, d’autres maisons de restauration rapide tentaient d’élargir leur audience, profitant du discrédit des deux chaînes contestées.
Mais en vain.
Ces concurrents auraient pu offrir une cuisine saine, faite de produits « de chez nous », en lien direct avec les producteurs, et sans intermédiaires, au plus grand bénéfice des clients.
Nenni, ce ne fut pas la voie empruntée.
Au contraire, ces petites maisons à l’enseigne du Bon Leurre, s’en allèrent se fournir dans une centrale d’achat, bien connue sur le marché, qualifiée pour l’occasion de « sociale »… Elle était européenne…et fournissait déjà en produits frelatés, et le Lotus Bleu et le Cerisier Rose, les deux gros concurrents, en conflit pour leur suprématie.
D’où la désespérance de la clientèle désabusée.
D’aucuns verront-là une fable, singeant la réalité politique, à dix jours du scrutin des « Régionales ».
Chacun voit midi à sa porte.
A chacun de choisir sa cuisine électorale
Et de choisir l’abstinence, au lieu de s’intoxiquer.
Jean Lévy