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1 Mon blog est un blog militant indépendant, sans prétention, bien évidemment non-commercial et totalement amateur. Les images (photos , dessins, vidéos), les textes dont je ne suis pas l'auteur ainsi que les musiques et chants seront supprimés de mon blog sur simple demande par courriel.

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Salut et fraternité

El Diablo

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CE QUE NOS LECTEURS DOIVENT SAVOIR :

Le blog Commun Commune est un blog indépendant des partis politiques et des syndicats - Sa ligne éditoriale est humaniste, progressiste et franchement euro-critique.  Il a vocation à nourrir le débat, y compris sur des sujets qui peuvent faire polémique, dans un esprit ouvert, hors tout sectarisme et tabous. Dans ce cadre, défenseur de la liberté d'expression, il donne à connaître des points de vue divers - hors tous propos racistes et/ou antisémites - y compris ceux qu'il ne partage pas forcément.

Si, par mégarde, un manquement à ces règles venait à apparaitre nous vous remercions de bien vouloir nous le signaler afin que nous procédions aux rectifications nécessaires. 

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« Celui qui combat peut perdre, mais celui qui ne combat pas a déjà perdu. »

Bertolt Brecht

Les vérités qu’on aime le moins à apprendre sont celles que l’on a le plus d’intérêt à savoir.

Proverbe chinois

Ça devient difficile d'être de gauche, surtout si l'on est pas de droite

Guy Bedos 

« Si tu trembles d'indignation à chaque injustice, alors tu es un de mes camarades. »

Ernesto Che Guevara

 

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DÉCLARATION de l’ACADÉMIE FRANÇAISE

sur l'ÉCRITURE

dite « INCLUSIVE »

adoptée à l’unanimité de ses membres dans la séance du jeudi 26 octobre 2017

Prenant acte de la diffusion d’une « écriture inclusive » qui prétend s’imposer comme norme, l’Académie française élève à l’unanimité une solennelle mise en garde. La multiplication des marques orthographiques et syntaxiques qu’elle induit aboutit à une langue désunie, disparate dans son expression, créant une confusion qui confine à l’illisibilité. On voit mal quel est l’objectif poursuivi et comment il pourrait surmonter les obstacles pratiques d’écriture, de lecture – visuelle ou à voix haute – et de prononciation. Cela alourdirait la tâche des pédagogues. Cela compliquerait plus encore celle des lecteurs.

Plus que toute autre institution, l’Académie française est sensible aux évolutions et aux innovations de la langue, puisqu’elle a pour mission de les codifier. En cette occasion, c’est moins en gardienne de la norme qu’en garante de l’avenir qu’elle lance un cri d’alarme : devant cette aberration « inclusive », la langue française se trouve désormais en péril mortel, ce dont notre nation est dès aujourd’hui comptable devant les générations futures.

Il est déjà difficile d’acquérir une langue, qu’en sera-t-il si l’usage y ajoute des formes secondes et altérées ? Comment les générations à venir pourront-elles grandir en intimité avec notre patrimoine écrit ? Quant aux promesses de la francophonie, elles seront anéanties si la langue française s’empêche elle-même par ce redoublement de complexité, au bénéfice d’autres langues qui en tireront profit pour prévaloir sur la planète.

 

 

Archives

 

Publié par Le Diablo

equateur-carte

correa-equateur-2014.jpg

Le parti de Correa défait aux élections locales

 en Equateur : une analyse critique de l'avenir 

de la « Révolution citoyenne »

 

Article AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

 

Les élections locales du 23 février en Équateur se sont soldées par une défaite inquiétante pour la « révolution citoyenne » en Equateur menée par le président Correa. Quelles leçons peut-on en tirer sur l'avenir de ce processus ?

 

Le président Correa a tenté de présenter le scrutin comme une victoire pour l' « Alianza Pais » (nom de la coalition gouvernementale), affirmant avoir gagné « 70 % des municipalités du pays ».

 


Sauf que le revers face à l'opposition de droite est incontestable : sur les 10 principales villes du pays, le parti de Correa n'en a gagné qu'une, Duran, sixième ville du pays … et en alliance avec le parti centriste « Centre démocratique ».

 


Ailleurs, c'est la débâcle. Non seulement dans la capitale économique Guayaquil où le candidat de droite remporte un triomphe (59,1 %) mais l'alliance gouvernementale perd Cuenca, troisième ville du pays ainsi que la capitale Quito, remportée par le candidat de la droite néo-libérale (58,9 %).

 


Sur les 23 préfectures (régions), le parti gouvernemental n'en remporte que 10. Le parti de droite SUMA en récupère deux, tandis que le parti indigène critique envers Correa, Pachakutik, en récolte quatre en Amazonie, le reste étant réparti entre partis centristes et de droite.

 


Au-delà du symbole, c'est l'avenir même de la « Révolution citoyenne » qui est en péril, l'opposition de droite disposant désormais de fiefs municipaux ou régionaux pour entraver le processus.

 


Toutefois, cette défaite est aussi le résultat d'un désenchantement populaire par rapport aux promesses de la révolution. A Quito même, les militants syndicaux, associatifs reprochaient au maire sortant « corréiste » Barrera de n'avoir guère changé la gestion de la ville.

 

Alors où en est la « révolution équatorienne » ?

 


Les acquis de la « Révolution citoyenne » : un changement réel

 

La grande réussite du mouvement lancé par Correa, indubitablement, est d'avoir changé la vie de millions d'équatoriens, sortis de la misère grâce à un affrontement courageux avec les diktats du FMI, de la Banque mondiale, un refus de l'idéologie néo-libérale.

 


Rompre avec les diktats du FMI, sortir de la dette. L'histoire de l’Équateur au XX ème siècle est celle de dictatures soumises à l'impérialisme américain, et depuis les années 1980 de plans d'ajustement structurel du FMI aux conséquences sociales désastreuses, jusqu'à l'effondrement économique du pays en 2000, contraint d'adopter le dollar comme monnaie nationale.

 


Sa dette extérieure, privée et publique avait augmenté en Equateur de 240 millions de $ en 1976 à 17 milliards de $ en 2006 : une augmentation par 80 ! La seule dette publique atteignait en 2000 les 100 % du PIB, permettant le pillage du pays par les groupes financiers internationaux.

 


Quand Correa arrive au pouvoir, en 2007, il commence par expulser les représentants du FMI, de la Banque mondiale et lancer un « audit de la dette » visant à refuser de payer une partie de la dette considérée comme « illégitime ».

 


Le gouvernement équatorien va alors refuser de payer 70 % de sa dette, laissant leur valeur s'effondrer … avant de les racheter à un tiers de la valeur : avec 800 millions de $, il rachète 3,2 milliards de $ de titres. Avec les intérêts, l'Equateur a économisé en tout plus de 7 milliards de $.

 


Conséquence immédiate : alors que le remboursement de la dette comptait pour 45 % du budget en 2006, sa part est aujourd'hui de 7 %, libérant des ressources immenses pour les dépenses sociales.

 


Des millions d'équatoriens sortis de la pauvreté. C'est la réussite de sept ans de « révolution ». Le taux de pauvreté qui avait dépassé les 60 % en 2000, retombé à 37 % en 2007, a diminué fortement, sous la barre des 25 % en 2013. L'extrême pauvreté, elle, est passée de 17 à 9 %.

 


Le taux de chômage officiel est passé de 9 % en 2006 à 4,5 % en 2013 … chiffre toutefois à nuancer quand on sait qu'entre 45 et 50 % de la population est « sous-employée », souvent du travail à temps partiel considéré insuffisant pour répondre à leurs besoins.

 


Des investissements massifs dans l'éducation et la santé. La libération du poids de la dette ainsi que l'explosion des prix des matières premières (pétrole en tête) ont permis de financer des dépenses sociales, qui sont passées de 7 % à 15 % du PIB en sept ans.

 


De 2006 à 2011 seulement, les dépenses publiques pour la santé et pour l'éducation ont été multipliées par trois. La proportion de la population inscrite à la Sécurité sociale est passée de 38 à 60 % depuis l'arrivée au pouvoir de Correa.

 


Si on prend l'exemple de l'éducation, le gouvernement de Correa a investi en sept ans 30 fois plus que les sept derniers gouvernements réunis. Ce qui a permis notamment la construction d'écoles, le recrutement de professeurs ainsi que la gratuité des manuels scolaires et de la cantine.

 


Grâce à la politique de Correa, l'éducation est à nouveau complètement gratuite, publique et universelle. Le taux de scolarisation est ainsi passé de 76 à 90 % depuis 2006, tandis que 450 000 enfants ont abandonné le travail infantile pour aller à l'école.

 


L’Équateur est aussi désormais le pays d'Amérique latine qui consacre le plus de ressources aux universités : 1,8 % du PIB, 1,6 milliards de $ par an, cinq fois plus qu'en 2006.

 


Correa a hérité d'un système largement privatisé – le nombre d'universités a triplé dans le pays entre 1990 et 2006, 90 % d'entre elles étant privées à but lucratif – qu'il tente de rationaliser, d'une part en finançant les facultés publiques, d'autre part en fermant les établissements privés à la qualité académique faible.

 



Un alter-capitalisme rentier et ses limites :un socialisme sans socialisme ?

 


Pour une « économie moderne » sans changement structurel. Correa le reconnaît : « Nous avons fait globalement la même chose, mais mieux, avec le même modèle d'accumulation que nous n'avons pas changé. Car notre but n'est pas de nuire aux riches, mais de créer une société plus juste », confiait-il au Telegrafo en janvier 2012.

 


Ainsi, ses investissements massifs dans l'éducation, notamment supérieure, s'inscrivent dans le pari de l' « économie de la connaissance mondiale », de la compétitivité de ses étudiants dans les universités internationales, de la commercialisation ensuite de services à haute valeur ajoutée.

 


Depuis 2006, la part du secteur privé dans la production n'a guère été modifiée. Les taux de croissance de 5 à 9 % par an ont permis à la fois de rendre les pauvres moins pauvres … et les riches plus riches, tandis que les entreprises équatoriennes génèrent des bénéfices records.

 


En 2012, 80 % des entreprises équatoriennes réalisent des profits, contre 39 % en 2006. Les 1 000 premières entreprises du pays ont généré 60 milliards de $ de revenus, dont 3,5 milliards de profits.

 


Entre 2011 et 2012, sur les 20 premières entreprises du pays, 18 ont vu leur chiffre d'affaire augmenter, 11 au-dessus de 10 %, révélant des secteurs économiques rentables sous hégémonie du capital privé : grande distribution, agro-alimentaire, banques, automobile, télécoms.

 


La concentration capitaliste atteint des sommets dans le grand commerce : 1 % des entreprises contrôlent 90 % des ventes, 10 % des entreprises 96 % de la distribution ! La chaîne équatorienne de super-marchés « la Favorita » est ainsi la 1 ère entreprise du pays, « El Rosado » la 3 ème.

 


La bourgeoisie équatorienne possède ainsi un pouvoir grandissant sur le pays, par son contrôle du commerce, mais aussi la dépendance croissante du pays envers les exportations.

 

Certes, le gouvernement équatorien a entamé un bras de fer avec la société pétrolière américaine Chevron pour obtenir réparation pour les dégâts causés : 500 000 hectares de terres détruites, 60 milliards de produits toxiques déversés, des centaines de milliers de vies gâchées.

 

Mais la pénalité de 9 milliards de $ proclamée par les tribunaux équatoriens est plus symbolique que réelle. Elle a permis au gouvernement équatorien de re-négocier des contrats pétroliers plus favorables à l’État, sans empêcher les multi-nationales de réaliser des bénéfices.

 


Les multi-nationales, loin de péricliter, se développent et font des profits en Equateur. Parmi les premières entreprises du pays, on trouve les géants mondiaux : l'américain General Motors (automobile), le français Lafarge (bâtiment), le suisse Nestlé (agro-alimentaire), l'hollandais Unilever (agro-alimentaire), l'américain Halliburton (pétrole), le français Schlumberger (pétrole).

 


Comme le dit lui-même Correa auFinancial Timesen 2010 : « Notre désir n'est pas d'annuler les contrats avec les multi-nationales, nous voulons qu'elles comprennent qu'elles doivent respecter les règles que notre pays établit ».

 


A ce jour, neuf entreprises pétrolières opèrent en Equateur, acceptant les conditions fixées par le gouvernement – un tarif fixe de rémunération de 24 à 31 $ par baril extrait (actuellement un tiers du cours officiel).

 


Parmi ces multi-nationales, on retrouve l'espagnole Repsol, l'italienne ENI ou la chinoise Andes Petroleum même si plusieurs entreprises américaines ainsi que la brésilienne Petrobras ont quitté le pays, n'acceptant pas les nouvelles conditions imposées par le pouvoir.

 


Concrètement, aucune nationalisation de secteur stratégique n'a été entreprise. Ni aucune privatisation depuis 2006, ce qui constitue une nouveauté par rapport à la période précédente.

 


Ainsi, dans le pétrole comme dans les Mines, le gouvernement a renégocié favorablement les contrats d'exploitation, augmentant le nombre de concessions. Dans l'eau, aucun plan national de « dé-privatisation » de l'eau, municipalisée puis privatisée dans les années 1990, n'a été entrepris, à commencer par la capitale économique Guayaquil

 


Dans les campagnes, l'introuvable réforme agraire. C'est la grande déception chez les militants paysans, en sept ans de « corréisme », la réforme agraire n'a toujours pas eu lieu. Et le pouvoir des multi-nationales de l'agro-alimentaire, des propriétaires terriens (latifundiaires) reste inchangé.

 


Selon le secrétaire national pour la Planification et le développement : « Nous voyons que les indicateurs d'inégalité dans le cas de la concentration de la terre se sont maintenus. Il faut entamer un processus franc de redistribution des terres, mais aussi de l'eau ».

 


En effet, en 2012, 5 % des grands propriétaires contrôlent 52 % des terres quand 60 % des petits propriétaires ne possèdent que 6 % des terres.

 


Un pays plus dépendant que jamais de la rente pétrolière. Le pari de Correa en 2007 était celui de la croissance économique pour répartir ensuite le gâteau entre riches et pauvres, multi-nationales et travailleurs.

 

Pari réussisi on observe que le taux de croissance a atteint en moyenne de 7 % depuis 2006, si on prend en compte que le prix du pétrole a doublé (de 60 à 120 $ le baril), dopée par les exportations multipliées par deux – alimentées à 80% par la vente de matières premières.

 


Pari très mitigé, si on analyse la répartition des revenus. Certes, les inégalités ont légèrement baissé depuis 2006 (selon l'Indice de Gini, passant de 0,54 à 0,49 mais encore au-dessus du niveau de 1990).

 


Mais les 10 % les plus riches contrôlent encore 38 % des richesses, les 20 % les plus riches la majorité des revenus : exactement le même niveau qu'en 2006. Les 62 plus grandes entreprises du pays monopolisent 41 % du PIB national.

 

Pari manqué, quant au développement du pays sur une autre base que celle « rentière », « extractive » : le pays est plus que jamais dépendant de sa rente pétrolière, de l'extraction et de vente de ses matières premières, donc de leur cours sur le marché global.

 


Ainsi, la balance commerciale légèrement positive en 2006 est désormais légèrement négative. Or, la balance commerciale pétrolière a été multipliée par deux passant d'un excédent net de 4,5 milliards de $ à 8 milliards de $.

 


En réalité, comme au Venezuela, cette exportation de produits pétroliers, la « rente », a conduit à une explosion des importations non-pétrolières, passant de 4 milliards de $ à 8,5 milliards de $ entre 2006 et 2012.

 


Une hausse des importations stimulée par la hausse de la consommation des ménages ( + 70 % depuis 2006), de moyens de production et de matières premières pour l'industrie.

 


Ironie de l'histoire, dans sa course extractive, l'Equateur doit aussi importer des produits sur toute la chaîne pétrolière : machine-outils pour l'extraction, produits intermédiaires pour le raffinage, carburant pour la consommation !

 


Conséquence, l'industrie manufacturière et l'agriculture vivrière reculent au profit de l'exportation de matières premières (agro-business, pétrole, produits miniers) : 70 % de l'économie dépend actuellement de la production de biens primaires, 8 % des services, 20 % de l'industrie.

 


Entre 2006 et 2011, le poids des exportations non-pétrolières correspondant à des biens primaires est passé de 56 à 61 %, tandis que les exportations de produits manufacturiers sont passées de 40 à 36 %. Les seules exportations pétrolières, en valeur, représentent 60 % des exportations.

 


Ceci explique la frénésie pétrolière du gouvernement Correa, prêt en 2013 à renier son engagement à ne pas exploiter le pétrole gisant dans le sous-sol du parc Yasuni, en Amazonie, quitte à s'engager dans la dégradation massive de l’environnement, le déplacement forcé des communautés indigènes.

 


Finalement, le bilan économique et social est plus que mitigé : concentration de richesses inchangé, développement limité à un modèle rentier non-durable, poids durable des grandes entreprises. Mais Correa pouvait-il autre chose, voulait-il autre chose ?

 


« La révolution citoyenne » : une révolution sans révolution ?

 


La « révolution citoyenne » ou le « bien vivre ensemble » entre riches et pauvres. Correa use et abuse des formules, il a nommé sa « révolution » « citoyenne », fait du « bien vivre » son concept central.

 

La « révolution citoyenne », le terme est bien trouvé, il révèle aussi les limites du processus.

 

La « Révolution » de Correa, lui-même la définit comme la reprise en main de la « machine » économique et politique héritée pour la « faire mieux tourner ». Ni changement structurel politique, ni changement structurel économique, une révolution sans révolution.

 

« Citoyen », le terme interpelle quand on reprend la grille d'analyse marxiste. La citoyenneté bourgeoise sert à masquer la structure de classe conflictuelle de la société bourgeoise, l' « égalité formelle » entérine les « inégalités réelles ».

 

Effectivement, ce que propose Correa et qu'il théorise, c'est l' « accession à la citoyenneté » pour une population pauvre urbaine et rurale, autrement dit accès à l'éducation à la santé mais aussi intégration à l'exploitation salariée et à la société de consommation, destruction des communautés rurales et des solidarités urbaines.

 

Il théorise aussi la « juste contribution » des plus riches, des grandes entreprises à la collectivité : elles peuvent continuer à réaliser des profits colossaux, jouir de l'immense part du revenu national tant qu'elle paye leur part de l'impôt à l’État équatorien.

 

Le concept même de « Bien vivre » – emprunté aux communautés autochtones – synthétise bien toute l’ambiguïté de l'idéologie du régime.

 

« Bien vivre », c'est bien-être centré sur sa dimension matérielle. Donc croissance économique dopée par l'exportation de matières premières, répartition de la rente plus égalitaire pour stimuler la consommation de biens importés, intégration contrôlée dans le capitalisme mondialisé.

 

« Bien vivre », c'est aussi vivre ensemble, une idéologie de la conciliation de classe, entre capital et travail, riches et pauvres, qui ne peut s'appuyer que sur une croissance forte – sur le modèle des dites « Trente Glorieuses » – pour alimenter profits et salaires.

 

L' « être humain d'abord », peut-être mais pour quels humains ?: Alors, dans cette optique, que signifient les innombrables déclarations de Correa sur la « prééminence de l'être humain sur le capital » ?

 

Certaines associations de défense de l'environnement mais aussi certaines communautés paysannes, autochtones ont fait remarquer que « l'humain d'abord » de Correa conduisait, en Amazonie, à la destruction de leur environnement, leur cadre de vie au bénéfice des multi-nationales et de l’État.

 

Étrangement, l' « humain » abstrait cédait face aux « humains » concrets que sont les paysans, les autochtones, eux-mêmes dépossédés par des « sociétés humaines » : entreprises et Etat.

 

D'autre part, l' « humain » équatorien cache derrière une égalité formelle (devant Dieu, devant l'Etat ?) d'énormes inégalités.

 

Entre une minorité d'« humains » ayant bénéficié de quatre siècle de colonialisme, de capitalisme prédateur et qui continuent à bénéficier d'une part plus réduite et une majorité d' « humains » toujours soumis à des formes de pauvreté, de chômage, d'accès réduit à l'eau ou à la terre.

 

Ce type de discours sur l' « Humain » abstrait n'est guère surprenant chez Correa, dont la formation philosophique n'est en aucun point marxiste, mais héritée d'une certaine « gauche chrétienne sociale », la formation économique issue des universités américaines, keynésiano-libérale.

 

« Nous ne sommes pas anti-capitalistes, nous sommes une gauche moderne ». C'est peut-être l'illusion de certains observateurs de vouloir voir en Correa un « anti-capitaliste », un « socialiste », là où celui-ci se présente ouvertement comme « alter-capitaliste », favorable au « marché ».

 


Correa dans le texte : « Le socialisme du XXI ème siècle défend la suprématie de l'être humain sur le capital (…) une des erreurs du socialisme traditionnel est d'avoir nié le marché. Une chose, c'est le marché gouvernant les sociétés, une autre les sociétés gouvernant le marché : voilà le socialisme du XXI ème siècle, une troisième voie, qui n'accumule pas pour accumuler ».

 


Une domestication du « capital » par la « société », du « marché » pour l' « humain », dénonciation de la chrématistique au nom de la « juste rémunération » du capital et du travail : on est plus dans du St-Thomas d'Aquin que dans Marx !

 


Mais Correa sait être encore plus clair : « Nous ne sommes pas anti-capitalistes, anti-capitalistes, nous sommes pour la justice sociale, la dignité, la souveraineté.

 


Une des erreurs de la gauche dure, c'est d'être anti-capitalistes, contre la propriété privée. Cette erreur, que même Cuba corrige maintenant, c'est d'avoir nié le marché, ni l'espace pour l'économie capitaliste moderne, sans lequel nos économies s'effondreraient ».

 


Comme ne cesse de le répéter Correa, lui se définit comme faisant partie de la « gauche moderne », la « gauche responsable » … une gauche sans révolution ni socialisme, qui s'accomode fort bien du capitalisme mondialisé tant qu'elle y trouve sa place.

 


Un pays sous dépendance, une « révolution en péril » :

Etats-unis, Chine, Union européenne

 

Or, les illusions sur une intégration gagnante de l'Equateur dans la mondialisation commencent à s'effriter avec la crise capitaliste. Depuis 2010, les exportations ont chuté de moitié, la dette repart à la hausse avec un déficit budgétaire qui pour la seconde année consécutive dépasse les 10 %.

 


Un « pays dollarisé », sous dépendance américaine. En dépit des grands discours de Correa, l'Equateur reste un pays sous la coupe des Etats-unis.

 


D'une part, l'Equateur est le plus grand pays à avoir le dollar américain comme monnaie officielle. Concrètement, cela signifie qu'il n'est pas un Etat souverain, sa politique monétaire est fixée depuis Washington, qui profite d'un impôt spécial, « droit de seigneuriage », pour l'émission de ses billets.

 


L'adoption du dollar a des avantages pour certains secteurs – il augmente les revenus de la rente pétrolière, facilite le commerce international – mais d'énormes inconvénients, essentiellement l'impossible compétitivité de l'industrie et l'agriculture équatoriennes, renforçant la voie d'un « capitalisme dépendant », rentier.

 


Les Etats-unis restent par ailleurs le premier partenaire commercial de l'Equateur, dépendant de l'évolution de l'économie américaine : 43 % des exportations sont dirigées vers les Etats-unis !

 


Les surplus générés par l'Equateur – finançant les programmes sociaux – dépendent ainsi de la balance commerciale positive avec les Etats-unis : 1,1 milliard de $ de surplus l'an dernier, compensés par les 460 millions de $ de déficit dans les produits non-pétroliers.

 


Du côté des importations, si les chiffres divergent, les importations viennent encore à 30 % des Etats-unis, loin devant la Colombie (13 %) et la Chine (11 %), en pleine expansion.

 

L'économie équatorienne est donc complètement à la merci des décisions économiques prises à Washington bien plus que du soutien réel apporté par les Etats-unis à divers programmes de déstabilisation en Equateur, de financement de l'opposition, d'émergence d'une « société civile ».

 


On se souvient de la tentative de coup d'Etat en 2010 lancé contre le président Correa. On sait le soutien qu'apportent les diverses officines américaines comme USAID, la NED à divers groupes d'opposition.

 


Récemment, la NED (National endowment for democracy), cette organisation cherchant à déstabiliser les régimes contraires à l'impérialisme américain, a même financé la constitution d'une agence de presse privée destinée à critiquer ouvertement le pouvoir équatorien.

 


Traité de libre-échange avec l'Union européenne, une menace. Mais l'impérialisme américain n'est pas la seule menace pour la « révolution », l'impérialisme européen s'installe en Equateur, par l'entremise de ses multi-nationales (Unilever, ENI, Repsol, Nestlé).

 

Les entreprises françaises ont leur part du gâteau en Equateur. C'est la banque d'affaires Lazard qui a aidé Correa à restructurer sa dette en 2008, récupérant une commission substantielle. C'est aussi Veolia qui gère désormais le réseau d'eau de Guayaquil, au grand dam des militants de terrain.

 

On pourrait citer encore Vinci qui a récupéré le chantier du contrat du métro-tram de Quito, Lafarge premier investisseur dans le pays, sans oublier Alcatel, Hôtel Mercure, Schneider, Sanofi Aventis, Coface, Bic, CGG, Pernod Ricard, Alstom.

 

Certes, les pays européens ne représentent encore que 15 % des exportations du pays et 9 % des importations (la moitié venant d'Allemagne bien sûr), mais cela pourrait changer avec l'adoption du Traité de libre-échange (TLC) avec l'Equateur.

 

Ce traité qui va être adopté au cours de l'année suivrait la voie entreprise par les pays néo-libéraux, soumis aux Etats-unis, que sont la Colombie et le Pérou, après avoir longtemps affirmé qu'il refuserait de signer un tel traité.

 

Ce traité ouvrirait complètement l'Equateur aux investissements et aux produits européens, un marché juteux surtout dans l'agro-alimentaire, tandis que l'agriculture locale, les communautés paysannes seraient mises en péril.

 

Une dépendance chinoise de plus en plus forte. Enfin, dernier point et non le moins inquiétant, l'Equateur a pu sortir de la crise de la dette en 2006, s'intégrer dans la mondialisation capitaliste, par une collaboration accrue avec la Chine.

 

Concrètement, le deal avec la Chine est désormais le suivant : une livraison toujours accrue de pétrole brut à la Chine en échange de prêts (à intérêt) finançant le développement d'infrastructures pétrolières ou hydro-électriques ainsi que le déficit public équatorien.

 

Ainsi, pour 2013, la Chine a accepté de financer à hauteur de 60 % le déficit équatorien, accordant un nouveau prêt de 3 milliards de $, le septième en cinq ans. Désormais, la majorité de la dette publique équatorienne est détenue par des fonds chinois

 

Depuis 2009, la Chine bénéficie donc de la livraison de près de 10 millions de barrils par mois venant d'Equateur, sur les 15 millions qu'il extrait officiellement. Les nouveaux prêts risquent de faire gonfler la facture, on parle de 90 % du pétrole équatorien vers la Chine d'ici 2016, ce qui explique la nécessité pour Correa de passer en force dans l'exploitation du pétrole en Amazonie.

 

Pour la Chine, ce jeu est gagnant à coup sûr, non seulement elle se garantit une source pérenne de pétrole – par l'endettement – mais aussi elle se contente pour l'instant de revendre le pétrole équatorien, réalisant un bénéfice commercial net.

 


La Chine a obtenu également la co-propriété de méga-projets d'infrastructure tel ce projet de raffinerie en Equateur dans lequel le pays asiatique envisage d'injecter 10 milliards de $.

 


Gagnante, la Chine l'est également par les importations massives de produits manufacturés chinois en échange du développement de l'Equateur. Le déficit commercial en produits non-pétroliers atteint désormais les 700 millions de $ avec la Chine.

 


Entre 2008 et 2013, les importations chinoises ont été multipliées par dix, passant de 360 millions de $ à 3 milliards de $.

 


Si l'Equateur a pu ainsi se relever après l'effondrement de 2000, la « faillite contrôlée » de 2006, de la dépendance uni-latérale envers les Etats-unis, le FMI, c'est aujourd'hui au prix d'une dépendance multi-latérale envers les Etats-unis, l'UE et surtout la Chine.

 


L'Union pour la « révolution » équatorienne est un combat !

 

En dépit de ses limites patentes, de ses illusions – parfois plus projetés par les acteurs européens que par les protagonistes de la « révolution » – le processus révolutionnaire entamé par Correa en 2006 a été un progrès pour le peuple équatorien, elle a aussi posé la question de l'alternative.

 

Suivant en cela l'analyse de nos camarades équatoriens – alliés critiques du processus depuis 2006 – la « révolution » nécessite désormais d'être vraiment commencée, dépassant ses illusions bourgeoises, capitalistes, pensant la transition au socialisme.

 

Il y a de quoi être critique aussi sur l'absence de direction collective révolutionnaire, le personnalisme (caudillisme) de Correa, son mépris pour ses alliés quand ils émettent une critique, qualifiant alors de « gauche infantile » ceux qui ne reconnaissent pas l' « économie de marché ».

 

L'infiltration de l'appareil d'Etat par des « révolutionnaires du lendemain », bureaucrates d'hier, le partage du butin pétrolier par une multitude d'acteurs publics et privés, peut rendre pessimiste. Tout comme les alliances avec les partis de centre-droit, déjà expérimentés au niveau local, évoquées par Correa pour les prochaines élections.

 

 

Toutefois, il existe une alternative. Comme au Vénézuela, avec le parti communiste, avec les communautés paysannes, indigènes, les secteurs ouvriers et populaires, l'approfondissement de la révolution, avec un réel contenu révolutionnaire et socialiste : c'est le défi de la « Révolution citoyenne ».

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