Ticket d’entrée au palais de justice (Editorial de L'ECHO de la Haute-Vienne)
On croyait avoir tout vu avec Nicolas Sarkozy. La première partie de la mandature avait été, dans le domaine de la justice, confiée à l’inexpérimentée Rachida Dati. Magistrats, avocats, prévenus, victimes se souviennent encore des dégâts qu’elle avait provoqués et le déménagement des tribunaux d’Instance a laissé un grand vide dans les départements. C’était l’acte I de l’éloignement de la justice de proximité.
L’acte II consistait à supprimer les juges d’instruction. Les affaires qui font trembler l’entourage du président de la République révèlent au grand jour le fond de la manœuvre.
L’acte III se joue en ce moment. Le gouvernement envisage d’instaurer une taxe de 35 euros sur certaines procédures en justice. S’il faut maintenant, lorsque l’on est victime, saisir la justice en commençant par payer un ticket d’entrée, il est clair que nous ne sommes plus tous égaux devant l’application de la loi. Le Conseil National des Barreaux (CNB), qui représente les 50 000 avocats de France, s’élève contre une telle iniquité et envisage de déposer un recours au Conseil d'Etat contre le décret. L’accès à la justice payant, aucun démocrate ne pouvait l’envisager. Sarkozy l’a fait pour mieux museler les actions devant une juridiction judiciaire en matière civile, commerciale, prud'homale, sociale ou rurale, ou devant une juridiction administrative. C’est l’accès au Droit dans sa conception la plus large qui est atteint. Nicolas Sarkozy avait inventé la double peine, le plaider-coupable, la comparution immédiate. Il vient d’inventer le timbre amende avant de se présenter devant le juge.
Thierry SPRIET
(Éditorial du 30 septembre 2011)