Présidentielle : la stratégie du PCF en question
Profitant d’une assemblée de militants communistes dans le Douaisis, en ce début d’année 2007, Georges Hage a évoqué la stratégie du Parti Communiste Français au cœur des échéances électorales.
Je serai le député de cette 16ème circonscription du Nord jusqu’au 19 juin prochain.
D’ici là, outre la poursuite de mon activité parlementaire à la mesure de mes forces et de mes moyens, je souhaite apporter ma part à la victoire espérée de celui qui est appelé à me succéder, Jean-Jacques Candelier, nous permettant ainsi de conserver ce siège historique dans des circonstances politiques que nous savons incertaines.
L’inversion du calendrier électoral, dont la première victime en fut l’inventeur, Lionel Jospin, conduit à la dépendance des élections législatives vis-à-vis de l’élection présidentielle. Celle-ci intervenant en premier, les secondes lui sont étroitement liées. Il s’agit, en définitive, de donner sa majorité au président élu.
Evidemment, la situation ne sera pas la même selon que le président s’appelle N. Sarkozy ou S. Royal.
En 2002, nous avons ici bien résisté à la « vague bleue », qui a suivi la présidentielle, puisque la droite a été battue au premier tour et que je suis resté finalement seul en lice après le désistement de la candidate socialiste arrivée derrière moi. Notons toutefois la progression du score socialiste au premier tour et considérons que dans l’hypothèse d’une victoire de Ségolène Royal, nous ne sommes pas à l’abri d’une « vague rose » susceptible d’emporter tout ou presque tout sur son passage et de rendre fragile, dans cette circonscription, le pari d’une succession réussie.
J’ajoute que la stratégie de délitement communiste choisie par la direction du PCF ne nous facilite pas la tâche.
Le parti pris a consisté à ne pas présenter de candidat communiste à l’élection présidentielle et à préférer un hypothétique rassemblement anti-libéral, une sorte d’OVNI – objet votant non identifié – incolore, inodore et sans saveur pour les électeurs communistes et pour tous ceux qui repoussent le libéralisme, la loi implacable du marché et qui ont fait le NON du 29 mai.
Beau résultat ! Au final, l’oiseau rare n’a pas été trouvé. Nous voilà avec une candidate, secrétaire nationale du PCF, que les communistes – pour ceux qui sont encore dans le parti et qui ont voté pour elle – ont auto-désignée. Mais elle ne se présente pas comme candidate communiste. Elle se met en congé de secrétariat national. Elle n’est pas non plus la candidate du rassemblement anti-libéral annoncée, puisque les autres – ces multiples chapelles et groupuscules que nous avons tentés d’agréger – n’en ont pas voulu. C’est donc l’OVNI, dont les électeurs ne peuvent comprendre ni ce qu’elle représente, ni à quoi elle sert.
Et pour ajouter à la confusion, outre Arlette Laguiller et Olivier Besancenot, ce dernier ayant fait partie un temps de la tentative d’agrégat avortée, voilà José Bové qui se lance dans la campagne avec le soutien de ceux qui n’ont pas voulu de M.G. Buffet.
Les conséquences de ce charivari risquent de se payer au prix fort. Il en résultera la dispersion des voix et des scores dérisoires pour les uns et les autres, un renforcement du vote utile en faveur de la candidate socialiste face au spectre d’un nouveau 21 avril, un vote conforté en faveur du FN crédibilisé comme l’opposant principal à ce spectacle peu ragoûtant de politique politicienne entre Sarkozy et Royal déjà consacrés comme les finalistes et entre les prétendus « anti-libéraux », qui se battent comme des chiffonniers.
Avouons qu’affronter les législatives après cela n’est pas chose facile, quand on est candidat communiste.
Cela me conforte dans cette idée de l’impérieuse nécessité qui s’imposerait à nous, surtout après le référendum du 29 mai, de nous engager au plus vite dans une candidature et une campagne communistes à la présidentielle, afin de donner un contenu de classe et de transformation sociale à ce NON majoritaire.
Les Français ne veulent pas d’un capitalisme débridé rompant avec le pacte social conclu à
la Libération
et fondé sur le programme du Conseil national de la résistance.
Or, c’est de ce capitalisme débridé, dont sont porteurs Nicolas Sarkozy évidemment, mais aussi, dans sa version sociale-démocrate bâtie sur le renoncement à la transformation sociale, Ségolène Royal.
Quant à François Bayrou, son « ni droite – ni gauche « équivaut à considérer que le capitalisme étant indépassable, il faut s’entendre pour le gérer.
Les Français sont des monsieurs Jourdain de l’anti-capitalisme. Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir. Les Français font de l’anti-capitalisme en l’ignorant.
Quelle est donc précisément le rôle d’un Parti Communiste si ce n’est de les éclairer, de les conduire vers une conscience de classe et à l’exigence clairement perçue d’un changement de société ?
S’ouvrait à nous un vaste champ à labourer, à ensemencer, à cultiver avec de beaux et abondants fruits à récolter grâce à une candidature et une campagne communistes.
La direction du PCF a décidé de miner le champ, de le livrer à la friche et la bipolarisation Sarkozy – Royal est destinée à le rendre pour longtemps infertile. Quel gâchis !
Pour l’heure, dans cette circonscription, notre campagne des législatives ne peut s’engager sur ces mêmes bases.
Nous sommes ici en terre ouvrière et minière, en terre de combat. Le capitalisme et ses ravages, nous connaissons. Sarkozy aussi. Nous l’avons vu avec la lutte de l’Imprimerie nationale. Nous savons également ce que donne la gauche des salons.
Si je suis demeuré député 35 ans après d’autres et si ce territoire est historiquement communiste, c’est parce que nous avons été nous-mêmes, des militants présents dans les luttes, s’efforçant de faire progresser les consciences, n’oubliant jamais d’où nous venions et ce pourquoi nous étions là.
C’est à cette aune-là qu’il nous faut puiser si nous voulons réussir la succession et faire élire Jean-Jacques Candelier.