SANTÉ ET AUGMENTATION DES SALAIRES – le Billet d’Humeur du Docteur Christophe Prudhomme
L’actualité met en avant la question du pouvoir d’achat, donc de l’augmentation des salaires face à une inflation galopante. Il est bon de rappeler que les inégalités de santé sont directement corrélées au niveau de vie. Ainsi le différentiel d’espérance de vie entre les 5 % les plus aisés et les 5 % les plus pauvres est actuellement de 13 ans, et alors qu’il avait tendance à diminuer ces dernières décennies, il recommence à augmenter.
Un autre élément important est l’espérance de vie en bonne santé : elle est actuellement de 65,9 ans pour les femmes et de 64,4 ans pour les hommes. Ces chiffres poussent à réfléchir face aux perspectives de recul de l’âge de la retraite à 65 ans, voire 67 ans. D’une manière plus générale, les politiques néolibérales menées ces dernières années dans les pays occidentaux avec des services de santé mis au pain sec ont des effets délétères qui ne peuvent plus être cachés. Ainsi l’espérance de vie aux Etats-Unis est aujourd’hui inférieure à l’espérance de vie en Chine.
En France, la mortalité des enfants avant l’âge de 1 an se dégrade depuis 2012 et notre pays est classé en toute queue de peloton des pays à économie comparable avec un excès d’environ 1 200 décès d’enfants par an. Autre indicateur important, celui des troubles dépressifs qui explosent avec des écarts du simple au double selon le niveau de vie. Enfin, en ce qui concerne la prévention et les déterminants de santé, notamment l’alimentation, la situation n’est guère reluisante.
Le fameux slogan « 5 fruits et légumes par jour » est de plus en plus difficile à atteindre quand les prix de ces produits augmentent et nous constatons que l’obésité touche de manière beaucoup plus importante les populations les plus pauvres. Oui, mais me direz-vous cela suffit-il pour relier état de santé et niveau des salaires ? Eh bien oui, car les études montrent que pour un revenu mensuel de 100 euros supplémentaires au-delà d’un revenu de 1 000 euros, on gagne 0,9 an d’espérance de vie.
Il est donc clair que la baisse du pouvoir d’achat qui touche les plus bas salaires ne pourra que se traduire par une dégradation de leur état de santé et une aggravation des inégalités. Car le bilan du tournant libéral de la fin du 20e siècle et du début du 21e siècle entraîne une dégradation du niveau de vie d’une partie importante de la population. Or il faut savoir que les progrès en termes d’espérance de vie, notamment en bonne santé, sont dus pour 20 % à la médecine mais pour 80 % à l’amélioration du niveau de vie. L’exemple actuel des Etats-Unis est éclairant et visiblement monsieur Macron veut nous entraîner sur la même pente.
Voilà donc une raison de plus de se battre pour obtenir le retour de l’indexation générale des salaires sur l’inflation, ce qui permet au minimum de préserver le pouvoir d’achat et donc de pouvoir se donner les moyens de rester en bonne santé.
Docteur Christophe Prudhomme
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