«Casse-toi, pauvre con ! », et alors ?
Voilà que la grande presse, dans son immense majorité, remet ça : Sarkozy vient encore d'altérer « l'image de la fonction présidentielle ». Comme si ce que les petits-bourgeois nomment « vulgarité » n'était pas la norme au sommet de l'Etat depuis au moins trois décennies. Oubliés, les dîners populistes de Giscard chez les représentants choisis de la « France profonde ». Oubliée la mascarade pitoyable de Mitterrand au Panthéon, fleurissant avec une ridicule fausse grandeur des tombes de géants, tout en réussissant à ressembler à sa propre caricature par Thierry le Luron. Oubliées les rodomontades insupportables de Pasqua, qui fut si longtemps ministre de l'Intérieur...
Les représentants de la grande presse sont veules, on le sait : qui a fait l'analyse rigoureuse de la politique d'extrême-droite de l'actuel gouvernement ? Qui a montré naguère qu'il y avait une feuille de papier à cigarette entre la pensée du candidat UMP et celle de Ségolène Royal ? Mais les représentants de la grande presse ne sont pas seulement veules : ils fonctionnent aussi comme des perroquets, leurs fainéants stéréotypes de langage en témoignent : « logiciel » pour « système de pensée politique » ; « bling-bling » pour tape-à-l'oeil, « people » pour populiste, « gagnant-gagnant » pour l'américain win-win ; pour ne pas évoquer les affectueux surnoms ou raccourcis bien à la mode branchée (« Condy » Rice, PPDA, DSK, etc.), ou encore l'affectueux « Tsahal », que l'on retrouve même dans l'Humanité, pour désigner l'armée israélienne d'occupation de la Palestine.
Au fond, tout cela ne serait rien s'il n'y avait pire. D'abord, ils ont des excuses, les journalistes : ils font cela pour de l'argent. Il faut qu'ils vendent à leur public ce que celui-ci veut bien leur acheter, c'est-à-dire les nouvelles et analyses qui lui plaisent. La presse qui ne plaît plus est morte. La question de la vérité en politique est donc complètement secondaire pour les médias : d'abord vendre, on verra plus tard pour l' honnêteté. Et c'est précisément pourquoi on nous amuse avec l'hystérie du vibrion colérique qui est actuellement - pour parler comme les journalistes - « locataire de l'Elysée ». Ou avec le fameux défi de roquet au pêcheur du Guilvinec (c'est plus confortable d'aboyer avec huit molosses aux alentours pour vous protéger). Ou avec cette déclaration stupéfiante d'immaturité lors d'une conférence de presse présidentielle : « Entre Carla et moi c'est du sérieux » ! Passons sur ces anecdotes humiliantes pour notre pays.
L'essentiel est sinon masqué, du moins fortement atténué, voire relégué à l'arrière-plan car moins vendeur : les licenciements, le vrai taux de chômage, le démantèlement du Code du Travail, les emplois précaires, les mi-temps forcés, les coups de goupillon contre la laïcité et l'enseignement public, la désindustrialisation de la France, la spéculation financière, la hausse des prix, la destruction des services publics, les SDF, les mal-logés, la chasse intensive aux faciès pour satisfaire aux quotas d'expulsions, la pauvreté qui s'étend, bref, les ravages du capitalisme. Car tout ça, coco, ça vend moins que le théâtre de boulevard présidentiel et ses pantalonnades de mauvais goût.
source : «action communiste - haute-normandie»