Connaissez-vous Madame POCHON ?
Editorial de la Tribune des travailleurs du 5 octobre 2016
Par Daniel Gluckstein
Connaissez-vous Madame Pochon ? Députée PS de Seine-Saint-Denis, Mme Pochon (Élisabeth de son prénom) couvre sa circonscription d’affiches proclamant que « depuis 2012 la gauche agit ». Pour preuve : « Maintenant, dans l’industrie, le coût du travail est moins élevé en France qu’en Allemagne. »
On se frotte les yeux. Et pourtant, c’est bien là, imprimé blanc sur fond rouge : le coût du travail a baissé – c’est-à-dire que les salaires des travailleurs, directs et indirects, ont diminué – et… la députée « socialiste » s’en réjouit. Il est vrai que les 50 milliards d’euros du pacte de responsabilité offerts aux patrons, le pillage incessant de la Sécurité sociale, le blocage des salaires, la déréglementation des droits par la réforme El Khomri, tout cela, c’est l’œuvre de son gouvernement de « gauche » !
L’affaire n’est pas nouvelle. Elle est aussi vieille que l’Europe de Maastricht. Nous le rappelons dans ces pages : à l’origine de la mortifère « loi de financement » qui enferme la Sécurité sociale dans un budget destiné à l’asphyxier, se trouve le plan Juppé imposé en 1995 en application du traité de Maastricht.
C’était la droite, certes. Mais qui, en 1997, fut le premier à mettre cette loi en application? Lionel Jospin, qui dirigeait alors un gouvernement PS-PCF-Verts (1). Jospin aurait pu abroger cette réforme inique qui avait dressé contre elle des millions de travailleurs et de jeunes. Mais il aurait fallu faire un pas sur la voie de la rupture. Jospin s’y est refusé. Acceptant docilement de faire voter la première loi de financement de la Sécurité sociale par sa majorité PS-PCF, il répéta la chose d’année en année, imité en cela par les gouvernements de droite qui lui ont succédé puis par le gouvernement Hollande-Valls succédant au gouvernement de droite.
C’est un ainsi que, de gouvernement en gouvernement, de gauche en droite et de droite en gauche, les gouvernements successifs défont la Sécurité sociale de 1945 et le droit à la santé qui y est attaché. Tout cela au nom de la baisse du coût du travail et du traité de Maastricht.
Et maintenant ? Les coups les plus terribles ont été portés contre la Sécurité sociale de 1945. Mais aussi longtemps que subsiste un segment de ce qui fut arraché il y a soixante-dix ans, ce segment constitue le socle auquel s’accroche le combat ouvrier pour la reconquête de toute la Sécurité sociale de 1945. Et cela est vrai, tout autant, pour l’école et le Code du travail.
S’appuyer sur ce qui n’a pas été détruit pour reconquérir ce qui l’a déjà été : cela passe par l’indépendance du mouvement ouvrier. Autrement dit : par la rupture avec les diktats de Maastricht, Bruxelles et de la Banque centrale européenne, la rupture avec l’Union européenne, la Ve République et la dictature de la classe capitaliste.
(1) Avec pour ministres, notamment : Martine Aubry, Ségolène Royal et Pierre Moscovici pour le PS (rejoints en 2000 par Jean-Luc Mélenchon) ; Marie-George Buffet et Jean-Claude Gayssot pour le PCF ; Dominique Voynet pour les Verts…
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