LA SITUATION AU SAHEL - Un entretien avec André Bourgeot anthropologue, Directeur de recherche au CNRS
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Dans son activité de recherche au CNRS, André Bourgeot a principalement travaillé sur l'espace Saharo-sahélien ainsi que sur la Sibérie, le Kirghizstan et la Mongolie.
1. Lors de la décolonisation officielle, en 1960, l’ancienne colonie « Afrique Occidentale Française » a été divisée en pas mal de pays, dont le Mali, la Haute Volta, devenue le Burkina Faso, le Niger ; à quels objectifs répondait cette division ? Était-elle complètement arbitraire ?
André Bourgeot: Il convient de rappeler qu’aux moments des indépendances en « AOF » (aujourd’hui Afrique de l’Ouest), les forces africaines progressistes revendiquaient le maintien des grandes entités territoriales coloniales à doter d’un contenu politique et économique radicalement autre. Ce fut un refus catégorique et les nouvelles forces néocoloniales imposèrent la création d’États-Nations aux frontières arbitraires quelquefois tracées à la règle comme, par exemple, les frontières particulièrement poreuses des États-Nations de l’espace saharo-sahélien. Ces créations (fortement inspirées du modèle français) artificielles reposaient sur le classique « diviser pour régner » sans logique historique endogène.
2. Alors que, dans les années 60, 70 et 80, dans de nombreux pays africains, la libération nationale s’est faite par les armes, y compris avec la participation de militaires, aujourd’hui l’Union Africaine semble coller au paradigme occidental de la « démocratie » par les urnes, avalisant le néocolonialisme et bannissant plusieurs pays d’Afrique de l’ouest dirigés par des militaires. Qu’est-ce qui explique ce revirement ?
André Bourgeot: Dans les ensembles Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie), aux statuts différents : Tunisie (en1881)et Maroc (en 1912) étaient ,dans l’Empire colonial français, des protectorats tandis que , seule l’Algérie était une colonie, et dans celui’ de l’Afrique de l’Ouest francophone (Mauritanie, Mali, Niger, Bénin, Togo, Burkina Faso, Sénégal, Guinée ( de Sékou Touré qui refuse de rallier la Communauté français)e, Côte d’Ivoire,), seule l’Algérie a acquis son Indépendance après 8 ans de guerre (1954-1962). Les autres États ont négocié leur indépendance le plus souvent octroyée par la puissance coloniale confrontée à des oppositions politiques radicales mais pacifistes qui, arrivées au pouvoir d’État, furent elles aussi confrontées à des oppositions belliqueuses armées à contenu idéologique « pro occidental »…
Il en va de même pour l’Afrique de l’Ouest anglophone (Ghana, dirigé par Kwane N’Kruma figure de proue du panafricanisme, Libéria, Sierra Léone) et lusophone (Guinée Bissau, Cap Vert, Sao Tomé et Principe).
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