HONTEUX DÉPASSEMENTS – Le Billet d’Humeur du Docteur Christophe Prudhomme
/image%2F1449569%2F20250127%2Fob_6e1692_christophe-prudhomme-billet.jpg)
Au fil du temps, le système des dépassements d’honoraires devient de plus en plus insupportable avec deux médecines qui fonctionnent à des niveaux différents. D’un côté, les généralistes de moins en moins nombreux et pourtant les plus essentiels, dans un pays où la population vieillit avec des patients atteints de maladies chroniques qui nécessitent une coordination des soins plus qu’une addition d’examens effectués par des spécialistes. Parmi les généralistes, une très faible proportion effectue des dépassements d’honoraires et l’ensemble des frais sont pris en charge par la Sécu et les complémentaires. Du côté des spécialistes, la situation est inverse avec aujourd’hui une majorité d’entre eux en secteur 2 avec dépassements et dans certaines spécialités, comme la chirurgie, le chiffre atteint 90 %. Cela signifie qu’il est impossible de trouver un chirurgien libéral qui ne pratique pas de dépassement. Or, dans certaines spécialités comme l’urologie ou l’ophtalmologie, dans certaines régions, le secteur privé est en quasi-monopole ayant vidé l’hôpital public de ses praticiens, attirés dans les cliniques par de meilleures conditions de travail et de rémunération.
Ce qui pose problème aujourd’hui est l’attitude du pouvoir politique qui a en permanence favorisé l’essor de ce secteur au mépris de l’intérêt des assurés sociaux qui sont pourtant ceux qui payent les cotisations servant à rémunérer les médecins. En effet, les lobbies médicaux très puissants ont obtenu des avantages qui ne peuvent que choquer les cochons de payeurs que sont les patients. Ainsi, afin de soi-disant plafonner les dépassements, il a été demandé à l’Assurance maladie de proposer aux médecins des contrats leur permettant, s’ils respectent des objectifs très peu contraignants, de bénéficier d’avantages financiers non négligeables. Les derniers chiffres fournis par la Caisse nationale d’assurance maladie indiquent que la prime atteint en moyenne 11 700 euros par an, avec des écarts variant de 4 300 euros pour les gynécologues médicaux à 23 000 euros pour les médecins nucléaires qui font partie des médecins les mieux payés, avec des revenus annuels moyens de plus de 210 000 euros.
Mais ce qui est encore plus étonnant est que seulement 60 % des médecins respectent les clauses du contrat et ce chiffre tombe même à 35% pour les spécialités d’anesthésie, de chirurgie et d’obstétrique qui pratiquent souvent les dépassements les plus élevés. Or, du fait des modalités d’octroi de ces primes qui consistent notamment en une prise en charge partielle des cotisations sociales, il n’existe pas de mécanisme pour récupérer les sommes qui peuvent être considérées comme indues. Plus grave pour les patients est que ces dépassements ne sont pris en charge que partiellement par les complémentaires et que près de 60 % restent à leur charge. Il y a donc urgence à revoir les mécanismes de rémunération des médecins afin de supprimer ces dépassements d’honoraires. La meilleure solution est d’en finir avec la rémunération à l’acte et de privilégier le salariat.
Docteur Christophe Prudhomme
Médecin urgentiste -Syndicaliste
SOURCE : Facebook