LA DETTE DES HÔPITAUX – Par le Docteur Christophe Prudhomme
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Deux exemples récents des difficultés financières rencontrées par des hôpitaux illustrent une situation insoutenable de leur dette. Il faut faire un retour en arrière pour comprendre la situation. En 2002, lors de la mise en place de l’euro et de la Banque centrale européenne, les hôpitaux se sont vu retirer la possibilité d’emprunter auprès de la Caisse des dépôts avec des intérêts très bas et des délais de remboursement qui pouvaient aller jusqu’à 60 ans. Il leur a fallu se tourner auprès des banques commerciales avec des taux d’intérêts qui ont pu atteindre près de 20 % avec les emprunts dits toxiques. Le résultat est aujourd’hui catastrophique. Ainsi l’Institut Mutualiste Montsouris à Paris, établissement de 450 lits, est en cessation de paiement du fait d’une dette cumulée de 120 millions d’euros due à sa reconstruction qui n’a pas été financée par l’Etat.
À Marseille, c’est l’Assistance Publique qui est aujourd’hui dans une impasse avec une dette de 840 millions d’euros qui l’empêche d’engager des opérations de rénovation de ses bâtiments vieillissants et qui se dégradent. C’est ainsi que son directeur demande que l’Etat reprenne cette dette à sa charge considérant qu’il en est responsable et que, sans cette mesure, il ne sera plus en capacité d’assurer le bon fonctionnement de l’hôpital qu’il dirige. Il faut noter qu’il est exceptionnel qu’un directeur de ce niveau, à la tête d’un des plus grands CHU de France, mette ainsi l’Etat face à ses responsabilités. Cette situation scandaleuse est dénoncée depuis des années. En effet, la seule charge des intérêts dépasse chaque année 1 milliard d’euros au grand bénéfice des banques. Ainsi pour 2023, les bénéfices de la seule BNP ont atteint 11 milliards d’euros. Il est donc clair que la dette des hôpitaux a été créée par la logique néolibérale soutenue par E. Macron et l’Europe, qui enrichit les banques au détriment des services publics, notamment celui de la santé.
À la veille d’un nouveau 49.3 pour la loi de financement de la Sécurité sociale, il est important de rappeler cette situation aux députés qui ne voteraient pas la censure. Il faut leur rappeler qu’au-delà des chiffres, il y a des vies en jeu. Les fermetures des services d’urgence et les dysfonctionnements des SAMU dus à un manque criant de moyens sont la cause directe de ce que nous appelons « des morts évitables » qui sont aujourd’hui chiffrées autour de 1 500 à 2 000 par an. La question de la dette doit effectivement être résolue mais, n’en déplaise à Mr Arnault et à ses amis, en les taxant un peu plus qu’ils ne les sont aujourd’hui. Ce serait normal car un rapport du ministère des Finances paru ces derniers jours indique que les impôts des 0,1 % les plus riches ont diminué entre 2003 et 2022 alors que ceux des 50 % les plus pauvres ont augmenté. Alors mesdames et messieurs les députés, allons chercher l’argent là où il est pour sauver des vies aujourd’hui et arrêtons de nous bassiner avec la dette que nous allons laisser à nos enfants.
Docteur Christophe Prudhomme
Médecin urgentiste - Syndicaliste
SOURCE : Facebook