ÉLECTIONS EN ITALIE : le jeu de bonneteau, une triche politique organisée – Par Jean LÉVY
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Jusqu'en juillet 2022, le gouvernement italien, dit "d'union nationale", était présidé par Mario Draghi, banquier et ancien président de la Banque Centrale Européenne composé du Mouvement 5 étoiles (M5S), de la Lega, du Parti Démocrate (PD), et de Forza Italia .
C'est dire que le pouvoir italien, du "centre gauche" à la droite, avait toute la confiance des autorités de Bruxelles. Mais les exigences de celles-ci en matière sociale et économique ont soulevé le tollé en Italie : par exemple, la suppression d'un revenu minimum garanti pour les citoyens italiens vivant en dessous du minimum de pauvreté.
Du fait de cette suppression et de quelques autres, le mouvement 5 Etoiles, qualifiée "de gauche", quittait la coalition pour tenter retrouver un soutien populaire.
Par ailleurs, les tensions concernant l'aide militaire à l'Ukraine à la suite de la guerre avec la Russie, avaient également provoqué une scission au sein du M5S, avec le retrait du ministre des Affaires étrangères, Luigi Di Maio.
Le 20 juillet, Draghi s'est adressé au Sénat, réitérant son soutien à l'Union européenne, à l'Otan et à l'Ukraine, affirmant qu'il était absolument nécessaire de mener à bien les réformes économiques et judiciaires engagées par son gouvernement.
Le 21 juillet, le Premier ministre Draghi démissionne après qu'un nouveau vote de confiance au Sénat n'ait pas réussi à passer à la majorité absolue, à la suite des défections de M5S, de la Ligue et de Forza Italia.
L'Italie se trouve donc sans gouvernement et sans majorité.
A défaut de recours aux anciens compromis entre les forces politiques italiennes traditionnelles, les forces du Capital se devaient de rechercher une formule nouvelle, susceptible de rassembler une majorité parlementaire.
C'est ainsi que, sortant le lapin du chapeau, la bourgeoisie italienne recourt à une formation très minoritaire, "Les frères d'Italie", qui se réclame ouvertement de Mussolini.
Ce choix soulève d'abord les hauts cris de la "gauche" européenne. Ses médias annoncent avec horreur un second fascisme italien, rappelant, preuves à l'appui, les connexions directes entre Giorgia Meloni avec les nostalgiques du Duce.
Mais les électeurs italiens, attendent une rupture profonde dans la politique romaine...
Les résultats accordent la victoire à la coalition composée principalement des partis Frères d'Italie, de la Ligue et Forza Italia, qui remportent la majorité absolue dans les deux chambres du Parlement.
La dirigeante des Frères d'Italie, Giorgia Meloni, devient la première femme présidente du Conseil des ministres.
En deuxième position, la coalition de centre gauche, menée par le Parti démocrate, se stabilise à 26 % après avoir appelé à faire barrage à l'extrême droite. En troisième position avec 15 % des voix, le Mouvement 5 Étoiles perd plus de la moitié de ses électeurs par rapport à 2018. Celui-ci est suivi par la liste libérale Action/Italia Viva qui rentre au parlement avec 8 % des voix.
Après sa victoire, Giorgia Meloni s’emploie à donner des gages aux marchés financiers et à l'Union européenne.
En signe d'ouverture, Guido Crosetto, le plus proche conseiller de Giorgia Meloni, propose que le prochain budget de l'Italie, qui doit être soumis à la Commission européenne, soit rédigé par Mario Draghi, avec la collaboration des équipes de la coalition de droite.
Le président du Conseil sortant, avec lequel Meloni est régulièrement en contact, lui dispense ses conseils et lui aurait fait accepter, indique le quotidien La Repubblica, un « pacte » portant sur le maintien du soutien militaire à l'Ukraine, de l'adhésion à l'OTAN et de la politique d’austérité budgétaire.
Il lui suggère également de nommer son ami Fabio Panetta, actuel membre du directoire de la Banque centrale européenne, à la tête du ministère de l’Économie. Les marchés financiers ont réagi favorablement à la victoire électorale des Frères d'Italie, la Borsa Italiana ayant ouvert en hausse le lendemain...
Comme quoi les milieux financiers de Bruxelles, soutenus par la "gauche européenne", sont aptes à utiliser la soif de changement et de rupture des populations, afin que les changements politiques souhaités ne se réalisent jamais.
Un "bon" gouvernement, pour l'Union européenne, c'est un pouvoir qui "a la confiance des marchés".
« Il faut que tout change pour que rien ne change »
Giuseppe Tomasi di Lampedusa.
Jean LÉVY