Pourquoi je voterai « Front de Gauche » le 10 juin prochain (Tribune libre)
POURQUOI JE VOTERAI
« FRONT DE GAUCHE »
LE 10 JUIN PROCHAIN
par Jean LEVY
Cette prise de position va sans doute étonner plus d’un ami, et provoquer des réactions hostiles chez d’autres. En effet, la tonalité des articles publiés par « canempechepasnicolas », fort critique à l’égard de l’orientation du PCF et de Jean-Luc Mélenchon, pouvait laisser entendre un vote « blanc » ou une abstention de ma part, lors du premier tour des législatives.
Aussi, faut-il expliquer les raisons de cette décision pour garder une cohérence entre les écrits et les actes.
Quel va-t-être l’enjeu primordial de ce premier tour ?
Le PS va-t-il, à lui tout seul – ou avec les Verts – obtenir la majorité absolue à l’Assemblée nationale ?
Cette hypothèse n’est pas exclue. Une telle majorité, destinée à soutenir en toutes circonstances le Président de la République et les décisions qu’il prendra, aurait vocation à jouer les « godillots », fermant ainsi la porte à toute mise en cause de la politique définie par François Hollande.
Or, chacun sait que des décisions essentielles vont, très rapidement, être prises sur l’Europe avec l’objectif d’enfoncer encore plus la France dans le carcan d’un fédéralisme accentué, réduisant davantage l’étroite marge de souveraineté qui lui reste. Il va s’en suivre une politique d’austérité pesant sur les couches populaires, encore plus drastique que celle que nous connaissons aujourd’hui.
D’autre part, la volonté guerrière manifestée par les dirigeants socialistes, à l’encontre de la Syrie aujourd’hui, comme de la Libye hier, la participation accélérée revendiquée à l’Otan, avec l’objectif de participer aux opérations de brigandages au service des multinationales, montre le caractère extrêmement dangereux de la politique revendiquée par le nouveau pouvoir socialiste.
Si les élus de la coalition PS-Verts détiennent la majorité absolue, nul doute qu’ils voteront comme un seul homme, le plan de « Kollaboration » maudit, prescrit par l’Allemagne. Et les élus du PCF et du Front de Gauche, réduits à la portion congrue, ne pèseront guères dans la balance.
Ils auront alors beau jeu de pousser des cris d’orfraies et de jouer à l’opposition…
Mais, si un groupe « PCF- Front de Gauche » peut, par le nombre de ses députés (mais aussi par le poids des millions votes recueillis), constituer une force indispensable à la constitution d’une majorité dite « de gauche », donc étant nécessaire à l’adoption des lois souhaitées par le pouvoir socialiste, les députés communistes et Front de Gauche seraient en mesure de faire capoter les désastreux projets gouvernementaux.
On m’objectera que dans cette position d’arbitre, les élus PCF et Front de Gauche, comme du temps de la « gauche plurielle », s’inclineront pour ne « pas déclencher de crise », et qu’ils avaleront leur chapeau une fois de plus.
Certes, c’est un risque.
Il existe et constitue une donnée à prendre en compte.
Mais, par contre, une telle orientation créerait nécessairement une réaction extrême au sein du PCF et dans son électorat. Il mettrait en cause l’existence même du Parti communiste, tel qu’il existe aujourd’hui. Cette nouvelle situation pourrait permettre une réunification du mouvement communiste en France sur des bases de classe et de lutte contre l’impérialisme.
En cas inverse, le PCF s’opposant, vent debout, contre les projets du Parti socialiste, les conditions seraient crées pour la renaissance d’un véritable et puissant mouvement d’opposition populaire.
J’entends d’ici les ricanements de camarades, ironisant sur mes « illusions ».
Pourtant, rien n’est joué.
Dans un sens comme dans l’autre.
De nombreuses luttes se développent dans notre pays.
La victoire remportée par les ouvriers de chez Goodyear contre une puissante multinationale, une « première » depuis des décennies, montre que la résistance se renforce vis-à-vis du capital. Et qu’une telle évolution ne peut manquer d’engendrer des évolutions salutaires au sein même de forces, qui avaient lâché prise depuis 1981.
En votant dimanche pour les candidats du PCF- Front de Gauche, je joue la carte d’un avenir ouvert. Sans illusions, mais avec l’idée que rien n’est perdu d’avance quand on fait confiance aux luttes populaires.
Jean Lévy