Face au chantier
Triste record historique : depuis treize ans, jamais le chômage n’avait culminé à 10%. «C’est l’héritage de Sarkozy», a fait valoir Jean-Marc Ayrault. Exact. Par souci de précision, il conviendrait d’ajouter : «Et de sa politique soumise aux règles des traités européens votés par les parlementaires libéraux et socialistes en Europe». Le rappeler n’est pas céder à la polémique mais situer les conditions d’une riposte offensive contre le chômage endémique qui est en rapport direct avec les baisses de revenus – donc de la consommation populaire –, avec des sous-investissements publics et privés dans l’économie, avec la liberté accordée aux banques de faire n'importe quoi avec notre argent. Ah ! cette «compétitivité» et cette «rentabilité» portées aux nues par le Traité de Lisbonne et auxquelles le «mécanisme budgétaire européen» en préparation prétend ajouter l’obligation constitutionnalisée de l’austérité durable pour les peuples.
Pour le nouveau pouvoir français, le chômage et la récession vont très vite quitter le registre de l’héritage pour s’inscrire dans celui des chantiers à ouvrir pour inverser le cours de la crise du système capitaliste européen et de son environnement mondial. Il y a urgence à installer les freins disponibles et à engager de vraies réformes de gauche. Augmentation sensible du Smic, interdiction des licenciements boursiers, droits nouveaux aux salariés, création d’un pôle financier public, réforme fiscale redistributive, notamment, s’imposent. Comme s’impose la contestation radicale des traités européens en vue de leur transformation.
A ce jour, les engagements de François Hollande restent inférieurs aux moyens nécessaires à la riposte. Mais un fort groupe parlementaire «Front de gauche», dans quelques semaines, pourrait créer la dynamique dont la gauche a besoin.
Christian AUDOUIN
Editorial de L'ECHO
Vendredi 8 Juin 2012